Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

Je ronge mon
frein, ça fait
mal
Hips !
Burp...
Etrangement, Dieu dévore affreusement son destin, de sorte que la mort s'enfuit en rampant depuis le néant de l'individualisme
Thal l'errant ::
Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

22 Septembre 2010 ::

« Liberté chérie - 2ème partie »

:: Baratin

Ce billet fait partie d'un sujet qui en comporte deux :
1. Liberté chérie - 1ère partie
2. Liberté chérie - 2ème partie


Les abus de la liberté tueront toujours la liberté

André Maurois (« Mémoires »)

Réglementer, légiférer, prescrire, proscrire, prohiber, interdire, légaliser…

Bien souvent, toutes les règles, prescriptions, interdictions dont la liste s’allonge chaque jour un peu plus, ne sont que la conséquence de l’incivisme de nos concitoyens.
Par exemple, autant il peut sembler logique d’interdire de faire un feu de camp dans une forêt ou une garrigue en plein été, autant un feu de plage, vous l’avouerez, a tout de même de maigres chances d’aboutir à un incendie. Pourtant, c’est interdit et passible d’une forte amende. Mais quoi de plus normal que de le proscrire, puisque la plupart du temps ce feu convivial va s’additionner d’une beuverie avec force tessons de bouteilles qui trancheront les pieds tendres des enfants plagistes du lendemain.

Cela dit, il ne faut pas non plus fumer dans les lieux publics, rouler bourré, jeter ses ordures dans la nature, laisser ses lumières allumées, laver sa bagnole et arroser sa pelouse en pleine canicule. Et là, allez savoir pourquoi, alors que ces règles là sont difficilement contestables, parce que justement elles nuisent à la liberté d’autrui, liberté à respirer un air non vicié, liberté de circuler sans risquer de mourir par la faute d’un inconscient, liberté de vivre dans un environnement non pollué, liberté de pouvoir jouir de suffisamment d’eau potable… Allez savoir pourquoi, ces règles-là, justement, légion sont ceux qui ne les appliquent pas.
Par contre, donnez leur des tombereaux de règles débiles, et tous les moutons s’empresseront de les appliquer dans la lettre, et surtout pas dans l’esprit. Avec le plus grand zèle.
Vouloir tout régenter et tout réglementer, vouloir légiférer sur tout, voilà à quoi ça nous mène.

La liberté ou la mort

Nous vaincrons ou nous mourrons ici
De la douce mort des hommes libres

E. Moritz Arndt ("Vaterlandslied")


La liberté est peut-être la seule cause, la seule idée pour laquelle je me sacrifierais, ou en tous cas risquerais ma vie. Pour le reste, comme disait Brassens, mourir pour des idées, d’accord, mais de mort lente. D’accord, mais de mort len-en-en-en-teuh…

Feu mon bien-aimé grand père me traitait d’anarchiste, mais il n’y avait ni colère, ni reproche dans sa voix. C’était plutôt un mélange d’incompréhension, d’attendrissement, et peut-être même d’envie.
J’ai toujours été une sorte d’électron libre, alternant selon le sujet l’hyper discipline et l’hyper indiscipline. Si j’avais eu le malheur de faire un service militaire « classique », j’aurais certainement passé dix mois au gnouf. Par contre, quand je vois un type prendre le volant avec 2 g. d’alcool dans le sang, j’ai envie de lui flanquer mon poing à travers la gueule.

Je ne supporte pas qu’on me fasse de reproches sur ma manière de faire les choses, de voir les choses et encore plus sur ce que je suis. Mais je peux me le permettre, car jamais je ne reprocherai à quelqu’un sa manière de faire ou de voir les choses, ou ce qu’il est. Je défends ma liberté tous ergots dehors tant que je sais qu’elle n’empiète pas sur celle des autres.

Quelqu’un était persuadée que si j’étais à ce point rétif aux reproches et aux exigences d’autrui, c’est parce que j’avais conservé un traumatisme infantile vis-à-vis des principes éducatifs haut placés de mes parents, qui se serait donc traduit par une sorte de rejet phobique et pour ainsi dire viscéral de toute forme d’autorité et de réprobation.
Par contrecoup, je serais devenu trop permissif avec mes gosses. Une sorte de soixante-huitard très attardé en quelque sorte. Si on leur demandait leur avis, je doute pourtant que les principales intéressées seraient d’accord.

Liberté et responsabilité

La liberté, ce n’est pas la liberté de faire n’importe quoi, mais le refus de faire ce qui est nuisible

Alexandre Minkowski (« Une certaine idée de la médecine »)


Je ne supporte pas le flicage, sans doute aussi parce que je n’en ai pas besoin.
Dans un monde sans flics, sans code pénal, sans code civil, sans contraintes artificielles, abusives et inutiles, je ne me mettrais pas pour autant à rouler à 100 à l’heure dans des ruelles piétonnières, à insulter les gens dans la rue parce qu’ils ont une tête qui me revient pas, à frapper ma femme, à martyriser mes enfants, à me servir dans les magasins sans payer, à arrêter de dire bonjour, au revoir, merci ou s’il vous plait. Tout juste peut-être pourrais-je être tenté de torturer mon chat. Et encore…

Cela ne pourrait qu’améliorer ma situation. Je pourrais continuer à faire savoir poliment mais franchement ce que je pense à tout le monde, même aux chefaillons, sans craindre les mesquines et médiocres représailles de ces gens qui ont le « pouvoir », mais qui l’ont souvent trouvé dans un paquet de Bonux, ou en léchant des culs, voire en léchant des culs dans un paquet de Bonux.

Je ne supporte pas le flicage, c’est vrai. Je me souviendrai toujours de cette profonde impression de malaise que j’ai eue lorsque je suis allé visiter Londonderry en Irlande du Nord, et que j’ai vu toutes ces caméras, ces miradors, ces barbelés, ces marquages de territoires, ces tags vindicatifs. C’était pourtant après la guerre civile.

Alors oui, je redoute de voir fleurir des caméras partout, même si y’en a un qui nous claironne que c’est pas un problème et que c’est pour la sécurité de tous. Non, j’aime pas l’idée qu’on puisse être espionné au téléphone, sur le web. Et oui, ce que j’aime pas dans Paris, c’est qu’on peut y voir un car entier de CRS, pas parce qu’il y a un risque d’émeute, mais juste parce qu’on leur a ordonné de rester là, au cas où… Et oui, cette image me choque.

Mais tout ça c’est de la faute des autres. Ceux qui ne mettraient pas plus d’une heure à transformer un monde sans flics en enfer terrestre.

L’enfer c’est les autres

J.P. Sartre (« Huis Clos »)

Des objections ?

Certains me diront qu’on n’a pas à se plaindre car il existe des endroits où il n’y a pas du tout de liberté. Certes. Mais cette réponse n’est pas plus satisfaisante que celle qui consiste à dire que les pauvres qui mangent aux restos du cœur n’ont pas à se plaindre, vu qu’en Afrique il y a des gens qui crèvent carrément de faim.

D’autres diront que c’est incohérent de tenir de pareils propos alors que je fais un métier où je dois moi-même fliquer, et d’ailleurs beaucoup plus souvent que je ne le voudrais, ces chères têtes blondes en devenir. Je leur réponds que s’il y a un moment où le faire, et le plus intelligemment possible, c’est bien maintenant, et que si un jour, une fois eux adultes et moi vieillard ou mort, ils peuvent eux aussi dire en bombant la poitrine : « moi, j’aurais pas besoin de flics pour vivre dignement »… alors j’aurai un peu gagné.

Copyrat draleuq 2007

draleuq, 13h42 :: :: :: [12 méditations grotesques]