Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

Patience et longueur de temps
Ah
bon ?
Tant bien que mal, l'envie dévore horizontalement la démocratie. C'est pourquoi le temps s'enfuit en courant vers l'au-delà de l'existence
Lao Meuh ::
Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

4 Juillet 2007 ::

« Le putsch de la brasserie »

:: Histoire contemporaine, 1923

La fragile république de Weimar

Après l'armistice du 11 novembre 1918, signé dans le train de Rethondes, et qui met fin à la première guerre mondiale, l'Allemagne se voit imposer des conditions de redditions drastiques : il faut même l'insistance du Tigre Clémenceau et du maréchal Foch pour que l'armée française ne reçoive pas l'ordre d'aller investir le territoire allemand, projet auquel auraient souscrit semble-t-il le maréchal Pétain et le président Poincaré... Puis, le traité de Versailles, signé le 28 juin 1919, définit les sanctions humiliantes que l'Allemagne se voit infliger : amputée de nombre de ses territoires (dont bien évidemment l'Alsace Lorraine), dépouillée de ses colonies, son armée réduite à presque rien, et surtout, condamnée à payer une réparation pour la guerre de près de 300 milliards de marks or, soit l'équivalent d'une année de revenu de tout le pays ![1]

Quelques mois avant la signature du traité de Versailles, et après de graves troubles provoqués par la tentation communiste dans les grandes villes allemandes, la République de Weimar est créée, à la place du second reich de l'empereur Guillaume II. Mais les conditions de la défaite, le Diktat comme l'appellent les allemands, est accepté sans condition par la jeune république, ce qui lui donne une bien mauvaise image parmi le peuple qu'elle est censée diriger.

L'année inhumaine[2]

Au début de l'année 1923, la situation est terrible en Allemagne : le pays, saigné à blanc, traîne les pieds pour payer ce qu'on lui a imposé. Le 11 janvier, afin de forcer l'Allemagne à payer les réparations, des troupes franco-belges envahissent la Ruhr, le bassin industriel et principale source de richesse du pays. Les licenciements et les grèves s'enchaînent, et l'inflation ne connaît plus aucune limite : bientôt, il faut transporter une brouette entière de billets, pour payer une livre de beurre qui coûte plus de cent milliards de marks ! Dans ce terreau de misère progressent notamment les partis extrémistes, dont les communistes, et le NSDAP, un parti fondé par un certain Adolf Hitler, appelé parti nazi.

Le 26 septembre 1923, le président de la république et le chancelier déclarent l'état d'urgence : une nouvelle monnaie, le rentenmark, est créée pour tenter de stopper l'inflation, et plusieurs mesures économiques strictes sont prises. Un peu partout, le peuple joue le jeu de ces mesures qui se révèlent plutôt efficaces. Mais en Bavière, il n'en va pas de même : ces mesures autoritaires déplaisent, et le plus grand des Länder allemands déclare son propre état d'urgence. Trois hommes prennent le pouvoir à Munich, capitale de la Bavière : le commissaire Gustav von Kahr, le général Otto von Lossow, et le colonel Hans von Seisser.

Un putsch raté

Le 8 novembre 1923, dans une grande brasserie de Munich, le Bürgerbraükeller[3], 3000 bourgeois sont rassemblés pour écouter la harangue du triumvirat qui a pris le contrôle de la Bavière. C'est alors que des partisans du NSDAP investissent brutalement la brasserie, menés par leur chef, Adolf Hitler. Ce dernier, l'arme à la main, emmène les trois dirigeants dans l'arrière salle, et les somme de lui céder le pouvoir. Kahr, Lossow et Seisser acceptent du bout des lèvres, puis s'esquivent par l'arrière du bâtiment. Quelques heures plus tard, un démenti formel est annoncé à la radio : le coup de force d'Hitler est un fiasco complet.


Le Bürgerbraükeller, qui deviendra un des lieux
favoris de réunion des nazis

Le lendemain matin, les putschistes investissent les rues, et tentent de prendre le contrôle du ministère de la guerre. Mais la police leur fait face, et la situation dégénère rapidement : une fusillade éclate, et c'est la débandade, les insurgés se dispersent en quelques instants. Un seul homme fait face, le général Ludendorff, héros de la guerre, qui soutient activement le NSDAP. Une fois les fumées dissipées, on compte seize morts parmi les insurgés. L'un des fidèles d'Hitler, Hermann Göring, a quant à lui été gravement blessé à la cuisse[4]. Dans les rangs des fuyards, outre Göring, on note plusieurs grands noms du nazisme : Heinrich Himmler, Ernst Röhm, ou encore Rudolf Hess.


Adolf Hitler, Hermann Göring et Rudolf Hess

Deux jours plus tard, Hitler est arrêté. Le NSDAP est interdit, et, le 1er avril 1924, Hitler est condamné à 5 ans de prison pour haute trahison, non sans avoir fait montre de son exceptionnel talent d'orateur au cours de son procès. Il ne passe toutefois que neuf mois dans la forteresse de Landsberg am Lech, pendant lesquels il a tout loisir de dicter à son fidèle lieutenant, Rudolf Hess, le livre fondateur de sa vision de l'Allemagne : Mein Kampf.

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1. Keynes, le célèbre économiste britannique, faisait partie de la commission devant évaluer le montant de la réparation financière. Ecoeuré par le montant sidérant qui fut fixé, il démissionna, jugeant qu'une pareille somme ne permettrait pas à l'Allemagne de se relever un jour.

2. C'est ainsi que les allemands ont surnommé l'année 1923.

3. Cette brasserie sera totalement détruite des années plus tard, le 8 novembre 1939, lors d'une tentative d'attentat menée par un menuisier du nom de Johann Georg Elser, à laquelle Hitler échappera miraculeusement.

4. C'est à la suite de cet épisode que Göring devient dépendant à la morphine, addiction dont il ne se départira qu'en 1945, lors du procès de Nüremberg.

finipe, 23h58 :: :: :: [3 sarcasmes grinçants]

:: COMMENTAIRES

 POIZE Georges, le 05/07/2007 à 13h45

...... encore une fois : BRAVO.... c'est un épisode peu connu de l'histoire moderne de l'Europe ....
.... à quand la suite des "aventures de TONTON ADOLF" ? ?

 finipe , le 05/07/2007 à 14h00

J'y songe, j'y songe... Prochainement, un billet sur la fameuse "nuit des longs couteaux".

 skogkatt, le 08/11/2009 à 09h32

Il s'est fait les dents comme un jeune loup ! D'ailleurs, c'est comme Elvis, on nous ment depuis 50 ans : [http]

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