Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

Le boulot,
ça me
réussit pas
C'est pas faux
En vérité je vous le dis, l'esprit assassine horizontalement l'intelligence. Par là même, l'Histoire s'enfuit en atteignant la fin de l'individualisme
La Piscine ::
Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

30 Décembre 2006 ::

« Bonnes résolutions »

:: Les aventures du lion

En cette période de libations diverses, je laisse la parole à mon camarade le lion, puisqu'il est de coutume de conclure une année qui s'achève.

JOYEUSES FÊTES À TOUS !


finipe, 04h38 :: :: :: [6 divagations]

21 Décembre 2006 ::

« Statistériques »

:: Misanthropie

Tandis que vous lisez ces quelques mots insipides, il est probable que quelqu'un ou quelque chose répertorie quelque part certains de vos caractères personnels, de vos goûts, de vos souhaits. On vous classe, on vous décompose, on vous quantifie, on vous équationnise et on vous axiomifie. Ensuite, on établit une formule, puis on range chacun de vos morceaux dans de petites boîtes, avec les morceaux des autres gens identiques à vous. Le publicitaire statisticien, ainsi muni de ses outils que sont les sondages, les courbes de prévisions et les modèles chaotiques, désire ardemment savoir ce que vous voudriez acheter, pour qui vous voterez, si vous êtes locataire ou propriétaire, combien vous gagnez, quel âge vous avez, à quelles assurances vous souscrivez, si vous préférez les slips ou les caleçons, etc.

Non, ce n'est pas le synopsis de massacre à la tronçonneuse : ce serait plutôt "Terreur sur la courbe de Gauss" ou "Le tueur en série de la loi normale centrée réduite". Car, insidieusement, à chaque fois que vous laissez un tout petit morceau de vous quelque part, il est injecté dans la matrice publicitaire. L'on cherche à mieux vous cerner, mieux vous comprendre sans doute, et ce à une seule fin : vous PRÉVOIR.

Nous prévoir, c'est le rêve secret du vendeur. Il en rêve le soir tandis qu'il pratique un banal coït avec sa femme : c'est son ultime jouissance à lui, sa quête suprême, son Saint Graal. Si le vendeur peut nous prévoir, alors il peut nous proposer des choses à acheter avant même qu'on ait eu le temps de formuler un voeu. Mieux encore, il peut même nous aiguiller à notre insu vers le désir de possession de quelque chose qu'il veut nous vendre. Il "crée le besoin", et c'est ainsi qu'on se retrouve avec des tas de choses dont nous sommes persuadés avoir besoin, que nous désirons ardemment, et dont nous nous demandons quelques jours plus tard pourquoi nous l'avions acheté.

Et ceci est particulièrement valable, l'on s'en doute, à l'approche de ces périodes fastes où le contribuable moyen dépense des fortunes pour gâter son entourage. Aussi, chers lecteurs (oui, j'ai l'audace d'utiliser le pluriel), vous proposé-je céans une petite méthode pour embrouiller un peu tous ces fâcheux qui voudraient vous refiler le dernier éplucheur rotatif de brocolis ou la toute nouvelle crème anti ride du cul, et ce avant même que vous en ayez eu envie (et encore moins besoin).

Il suffit tout bonnement de répondre systématiquement à côté de la plaque : à chaque fois que l'on vous demande de remplir un questionnaire, qu'on vous interroge par téléphone ou qu'on vous sonde dans la rue, répondez n'importe quoi. Le venin de la désinformation se distillera de lui-même, car ces cuistres s'échangent et se revendent leurs fichiers.

Ainsi, si une enquêtrice du nom de Sophie Martin, à l'accent roumain à couper au couteau, vous demande si vous avez moins de 50 ans, répondez que vous en avez 64 et que vous êtes retraité. Si un sondeur du nom de François Martin (tous les sondeurs s'appellent Martin, c'est une grande famille), à l'accent marocain prononcé, vous demande si vous payez plus de 1500 euros d'impôts, répondez que vous êtes chômeur de longue durée.

C'est testé et approuvé par votre serviteur, et cela vous fera gagner de précieuses minutes de votre temps.




Note, à l'attention des sondeurs : j'ai 54 ans, j'habite Limoges, je suis célibataire, sans enfant, locataire. Je suis assureur, et passionné de conchyliculture en haute montagne.

finipe, 23h54 :: :: :: [8 critiques dithyrambiques]

18 Décembre 2006 ::

« L'exil d'un gentilhomme »

:: En vrac

Voici une petite nouvelle écrite il y a quelques temps, à l'occasion d'une activité satanique (qui consiste généralement à clouer les hiboux sur des portes de granges, boire de pleins calices de sang de lézard mêlé à de l'hostie pilée et des excréments de poule : j'ai nommé le jeu de rôle). C'est encore dans la veine de ce XVIIème siècle que j'affectionne tant.




Depuis déjà deux heures, les cliquetis des rapières résonnaient dans la salle d'arme décorée des armoiries de Tréville. Chacun avait soigneusement boutonné sa lame, de façon à ne point estourbir l'adversaire, mais l'on sentait dans ces démonstrations viriles et guerrières une ardeur toute légitime de jeunes gens ne ménageant pas leurs coups.

Les femmes, assises sous un aucube tendu par dessus les arcades, jouaient de leurs éventails avec une habileté qui n'avait rien à envier à celle des bretteurs. Parfois, au détour d'un quartier de soie trop découvert, elles lançaient quelque minauderie acérée, d'un coin de lèvre ou d'un regard éperdu. Aussitôt, les hommes redoublaient de courage.

Clemènt ferraillait hardiment contre le jeune vicomte d'Escatz, lorsque le maître d'arme vint interrompre les engagements des hommes, et les oeillades des femmes. Son allure austère et son âge relativement avancé fit son habituel effet : l'effusion de la jeunesse s'éteignit en un instant, et la sagesse et la mesure dont le maître d'arme faisait montre attisèrent le respect de chacun l'instant suivant.

— Pardonnez mon intrusion jeunes gens, déclara le vétéran avec son habituelle cordialité mêlée de componction, mais monsieur le comte est demandé par son père.

Clemènt salua alors son adversaire, jeta sa rapière garde en avant à l'un de ses camarades d'un geste ample, et se retira de la salle après s'être courtoisement incliné en direction des dames. A peine fut-il engagé dans les couloirs de la demeure qu'il entendit les épées et les rires reprendre là où il les avait laissés. Après quelques détours dans l'immense hôtel particulier qui l'avait vu grandir, le jeune comte de Tréville fut à la porte du cabinet de son père. Un laquais l'introduisit dans l'antichambre avec force courbettes, docile, servile avait-il coutume de dire en forme de provocation progressiste, même si ces semblants de révolte face à l'autorité paternelle ne trompaient que les candides.

Après quelques instants, un second laquais fit entrer Clemènt dans la vaste pièce où son père réglait ses affaires : capitaine d'un prestigieux régiment de l'armée, il accueillait très fréquemment des officiers, des soldats de tous horizons et de toutes conditions, et jamais pour des raisons triviales. Le jeune homme se douta donc que son père souhaitait l'entretenir de quelque affaire d'importance, aussi se préparait-il à recevoir les assauts de son aîné.

— Ah, Clemènt, vous voilà, dit le capitaine sèchement. Allez quérir un siège, et veuillez donc causer avec moi quelques instants je vous prie.

Clemènt s'exécuta promptement et décida de prendre l'initiative :

— Monsieur, je suis bien aise que vous m'eussiez fait l'honneur de me mander, alors que vos devoirs vous prennent tant de temps et d'énergie.
— Si je vous ai mandé de la sorte, Clemènt, vous devez savoir, ou du moins supposer, que j'ai des choses importantes à vous dire.

Le fils acquiesça, et avant qu'il pût ajouter un mot :

— Il me semblait vous avoir dit que je n'approuvais pas votre relation avec Mademoiselle de Changeay. Or, je fusse passé outre mes réticences si vous m'eussiez désobéi pour servir l'armée et la patrie, mais croyez bien que je ne cèderai pas à vos émois de jeunesse, jeune homme, déclara le vieux capitaine en soulignant ses deux derniers mots.
— Je crois, continua-t-il, que vos années de service dans ce modeste mais digne corps de cavalerie n'ont pu vous inculquer toutes les vertus indispensables à un gentilhomme accompli, et j'en suis fort mécontent. Votre aîné est déjà en passe d'obtenir une lieutenance auprès du roi, tandis que vous, vous n'avez que cette jeune femme dans la tête !

Alors que la colère du distingué capitaine était montée graduellement, le jeune homme avait déjà perdu l'engagement, et s'était tassé sur lui-même. Il essaya de se redonner courage et contenance en avançant une jambe dans une posture volontaire, et en portant le poing sur la hanche. Mais une fois de plus, son père avait pris sur lui l'ascendant incroyable qu'il possédait sur toute et tous, ce que les hommes de lettre nomment le charisme, et les hommes de guerre la poigne.

— Mais, Monsieur, balbutia-t-il en fouillant à toute vitesse son esprit à la recherche d'un quelconque argument qui eût pu lui faire reprendre l'avantage, on vous aura mal renseigné, je ne suis en rien épris de Mademoiselle de Changeay, et si quelqu'un a pu vous faire accroire le contraire, vous m'en voyez tout à fait navré.
— Cela suffit, Clemènt, ne devenez pas irrespectueux en me prenant pour un simplet, en plus de n'accéder en rien aux hautes distinctions auxquelles j'aspirais à vous faire prétendre. Ma décision est prise : je vous engage à chercher expérience en dehors du royaume pour au moins quelques mois.

Clemènt blêmit, crut perdre pied un instant, avant de se ressaisir et de se contrôler en enfonçant ses ongles dans la paume de sa main pour revenir à la réalité. Il remit d'aplomb son baudrier, posa la main gauche sur la garde damasquinée de sa rapière, et fit ses adieux à son père d'un salut courtois et respectueux, sans pouvoir ajouter un mot de plus. Alors qu'il passait la porte ouvragée du cabinet paternel, il crut saisir derrière lui un lourd soupir, qui se perdit dans le tintement de la clochette réclamant un laquais.

Le lendemain matin, son équipage était prêt, ses lettres d'adieux écrites, et ses armes fourbies. Il avait parcouru déjà trois lieues sans même se retourner quand le soleil daigna jeter un peu de lumière sur cette route de l'est qu'il empruntait.

finipe, 20h41 :: :: :: [2 poignants panégyriques]

14 Décembre 2006 ::

« L'exécution de Ravachol »

:: Histoire contemporaine, 1892

François Claudius Koenigstein naît en 1859 d'un père Hollandais et d'une mère Française. Son père bat sa mère régulièrement et finit par l'abandonner avec ses quatre enfants. François Claudius, qui devient berger à 8 ans pour nourrir sa famille, prend le nom de sa mère : Ravachol. Ayant perdu la foi, il devient anarchiste, voleur, faux-monnayeur, poseur de bombes, profanateur de tombe, et finalement assassin, ce qui lui vaut la peine de mort.


Photo de François Koenigstein, alias Ravachol

Son comportement lors de son procès (à l'énoncé du verdict, il crie « Vive l'anarchie ! ») et devant l'échafaud, nous allons le voir, va l'ériger en martyr de la cause anarchiste : c'est en son nom que seront commis les attentats meurtriers de 1892 à 1894 (notamment au palais Bourbon et au commissariat des Bons Enfants), et l'assassinat du président Sadi Carnot en 1894. Dans les jours mêmes avant la condamnation de Ravachol, une bombe tue deux personnes à l'estaminet "chez Véry", où Ravachol a été arrêté après délation du garçon de café.


Arrestation de Ravachol à la une du célèbre "Petit Journal"

Louis Deibler, l'exécuteur en chef des arrêts criminels (autrement dit le bourreau), et son fils et assistant Anatole, reçoivent des lettres de menaces. Le propriétaire qui les loge en reçoit également une le prévenant que si la tête de Ravachol tombe, son immeuble saute ! Le proprio, paniqué, met les Deibler dehors. Ceux-ci cherchent en vain une nouvelle location et sont finalement obligés d'acheter une villa...

Même les juges de la Cour d'Assises de Paris, harcelés de menaces, n'osent pas le condamner à mort et préfèrent les travaux forcés à perpétuité "avec les circonstances atténuantes". C'est alors qu'Alphonse Bertillon, directeur de l'identité judiciaire à la préfecture de police de Paris et créateur de l'anthropométrie, constate que les mensurations de Ravachol correspondent à celles de Koenigstein, un criminel recherché par la police de Saint Etienne pour 5 meurtres crapuleux sur les personnes de deux vieillards et d'une domestique, d'une quincaillière et de sa fille.

Ravachol ne reconnaît qu'un seul des assassinats, mais est cette fois condamné à la peine capitale. Exécuté le 11 juillet 1892 à Montbrison, il dit à l'aumônier venu pour le confesser : « Je m'en fous de votre Christ ». Il monte ensuite sur l'échafaud en entonnant la "Chanson du Père Duchesne" :

Si tu veux être heureux
Nom de Dieu !
Pends ton propriétaire
Coupe les curés en deux
Nom de Dieu !
Fous les églises par terre
Sang-Dieu !
Et l'bon Dieu dans la merde
Nom de Dieu !
[...]

Après l'exécution, un fonctionnaire de police envoie le télégramme suivant :

Justice a été faite ce matin à 4h05, sans incident ni manifestation d'aucune sorte. Le réveil a eu lieu à 3h40. Le condamné a refusé l'intervention de l'aumônier et m'a déclaré n'avoir aucune révélation à faire. Pâle et tremblant d'abord, il a bientôt montré un cynisme affecté et une exaspération au pied de l'échafaud dans la minute qui a précédé l'exécution. Il a chanté d'une voix rauque quelques paroles de blasphème et de la plus révoltante obscénité. Il n'a pas prononcé le mot anarchie et a, sous la lunette, poussé le dernier cri de 5716 2907 4584. Le plus grand calme n'a cessé de régner dans la ville. Rapport suit.

Comme on le voit, le télégramme était en partie chiffré, et il faut traduire "5716 2907 4584" par "Vive la République !". Ce fonctionnaire a sans doute pris ses désirs pour des réalités, puisque Ravachol a seulement eu le temps de crier : "Vive la Ré..." Il semble plus probable que s'il avait eu le temps de finir, c'est "Vive la Révolution !" qui serait passé à la postérité.

draleuq, 00h18 :: :: :: [4 injures]

10 Décembre 2006 ::

« Homo sapiens, patience »

:: Les aventures du lion

finipe, 20h08 :: :: :: [0 vilénie]

8 Décembre 2006 ::

« Télé réalité : les nouveaux gogols »

:: Misanthropie

Depuis plusieurs années maintenant que ce genre d'émission existe, je n'ai de cesse de ressasser mon profond mépris, ma haine farouche et inextinguible pour ces stupides programmes qu'on nomme "télé réalité". Voir ces pauvres gens s'exhiber et se ridiculiser volontairement, sous le regard avide et malsain de millions de téléspectateurs voyeurs, cela me met dans un état de rage physique. Réellement. Dès qu'une séquence de ce type d'émission m'est par hasard offerte, fût-elle très courte (ce qui est généralement le cas, puisque je m'empresse de zapper — sans quoi j'eusse déjà détruit un certain nombre de télévisions), mon état vire à l'atrabilaire : je suis profondément et viscéralement ex-as-pé-ré.

Et pour tout dire, j'aurais bien craché mon atrabile ici-même plus tôt, mais sous les dehors d'un cynisme à la mode, il est devenu très consensuel de jeter des assertions péremptoires telles que "la télé réalité c'est d'la merde". Difficile, donc, d'ajouter une pierre constructive à l'édifice des persiflages contre ces émissions : notons que, très probablement, une grande partie des persifleurs incriminés tiennent ce type de propos pour ne pas avouer qu'au détour d'une télécommande malencontreusement tombée entre leurs mains, ils se délectent de cette hideuse télévision, tout seuls dans leur coin, comme des chiens craintifs, en buvant leur honte jusqu'à la lie.

Alors il me fallait essayer de trouver un angle analytique un peu plus sérieux peut-être, pour ne pas verser dans le sarcasme gratuit et facile. Et finalement, imaginant tous ces gens prêts à se ridiculiser devant le monde entier pour quelques secondes de gloire, j'ai fait le parallèle avec les crétins ordinaires d'autrefois, les idiots du village. Le simplet d'antan, qui passait devant quelques bonnes gens, et recevait des quolibets, et parfois une gourmade de la part des plus vindicatifs d'entre les gens "normaux". C'était une habitude, un comportement social admis par la majorité, et nul ne s'offusquait que l'on mît en boîte le débile du quartier.

Heureusement, il y avait aussi le rire, qui permettait de dédramatiser beaucoup de choses : les acteurs et auteurs comiques se moquaient de tous ces travers qu'on préférait reconnaître chez les autres plutôt que chez soi, sans doute pour être bien sûr de sa propre supériorité. Molière ridiculisait les Précieuses, les médecins et les faux dévots, Marivaux frottait habilement les côtes de la noblesse, et Beaumarchais foulait allègrement du pied les institutions royales et les grands du royaume. Et puis, d'autres, moins littéraires, moins subtils et moins connus, mais tout aussi drôles, écumaient les théâtres et les villages pour offrir des farces grotesques ou grivoises, ridiculisant tour à tour le bègue, l'ivrogne, le cocu ou l'imbécile...

Mais aujourd'hui, les choses ont changé : de nouveaux comportements ont dû être admis comme étant conformes aux bonnes moeurs, tandis que d'autres devenaient incongrus. Parmi les nouveaux interdits, il est devenu notamment tout à fait hors de question de se moquer du faible, de l'idiot, de l'ivrogne ou du handicapé, c'est désormais très politiquement incorrect. Alors, les fabricants d'émission de télévision ont trouvé LA solution : ils ont directement invité les crétins à se présenter eux-mêmes, sans passer par le prisme de la farce. Plutôt que de payer des acteurs pour singer le cocu, ils ont directement payé des hommes pour tourner la tête des femmes fidèles. Plutôt que de payer un auteur pour se moquer de l'alcoolo de service, ils ont directement payé une bouteille à l'arsouille. Et puis ils ont mis des tas de spectateurs devant eux pour s'en moquer.

Ainsi donc, désormais, le gogol peut venir à la télé, ravi d'exhiber sa stupidité ou ses problèmes, et nous autres braves gens du village, pouvons contenter notre sadisme en riant de lui.

finipe, 23h17 :: :: :: [4 provocations]

6 Décembre 2006 ::

« La fin des guerres médiques »

:: Histoire antique, -479

Ce billet fait partie d'un sujet composé de quatre parties :

1. La bataille de Marathon
2. Léonidas & la bataille des Thermopyles
3. Thémistocle & la bataille de Salamine
4. La fin des guerres médiques



La bataille de Platées

Après la belle victoire grecque à Salamine, chacun passe l'hiver au calme et reprend des forces. L'armée perse campe en Thessalie, et son nouveau général, Mardonios, profite de ce répit pour tenter de soudoyer Athènes et mettre de son côté cette cité rudoyée : ses émissaires sont renvoyés vertement là d'où ils viennent, les athéniens arguant d'un surprenant patriotisme hellénique. Mardonios est piqué au vif par ce refus, et le printemps suivant, en 479 av. JC, il lance de nouveau sa gigantesque armée sur la Béotie et l'Attique. Les athéniens doivent à nouveau évacuer leur cité et gagner le Péloponnèse, où une nouvelle coalition panhellénique se forme, dirigée par Pausanias. Ce général spartiate, neveu de Léonidas (le héros des Thermopyles), est connu pour la rudesse de son commandement.

Les cités unies forment ainsi la plus gigantesques armée grecque de l'Histoire, plus de 100.000 hommes : cependant, c'est beaucoup moins que les perses, qui disposent encore de près de 300.000 hommes ! On trouve ainsi dans la coalition grecque : Sparte, Athènes, Trézène, Epidaure, Phlionte, Sicyone, Egine, Platées, Corinthe, Mégare, Eleusis, ou encore Chalcis. Thèbes a trahi et combat aux côtés des perses.


Enfin, les armées se mettent en marche : les perses font mouvement vers Platées, une cité située entre la Béotie et l'isthme de Corinthe, un lieu de bataille semble-t-il propice au fin stratège militaire qu'est Mardonios. Les grecs font mouvement vers le même endroit, menés par Pausanias, qui lui aussi est reconnu comme excellent général. Nous sommes au mois d'août 479 av. JC, et la bataille s'engage. Mardonios lance plusieurs attaques de cavalerie, toutes ardemment repoussées par des grecs pugnaces, en particulier ceux de Sparte. Dans le même temps, il attaque les lignes arrières de son adversaire, afin de les priver de ravitaillement. La stratégie s'avère payante, car il parvient à diviser les troupes grecques, qui se scindent et perdent le contact.

Mardonios, persuadé que la plus vive confusion règne parmi les grecs, décide de lancer une attaque massive et frontale : erreur fatale ! Les lignes perses se brisent sur les lances des spartiates, et Mardonios meurt dans l'assaut. Peu de temps après, les grecs parviennent à se rejoindre, et c'est rapidement la débandade chez les perses : la panique gagne les envahisseurs, puis la fuite désordonnée commence, au cours de laquelle les grecs font un véritable massacre. Les autres généraux perses, en désaccord politique avec Mardonios, ont déjà tourné les talons et fui depuis longtemps...

Quelques jours plus tard, l'armée se déplace vers Thèbes avec la ferme intention de punir les traîtres, en particulier Timégénidas et Attaginus, les chefs de ce parti. On leur livre les félons, qui sont conduits à Corinthe et suppliciés sans pitié.

La bataille de Mycale & la reconquête de la mer Egée

Le jour même de la victoire de Platées, selon Hérodote, la flotte grecque tombe sur ce qu'il reste de la flotte perse après leur défaite à Salamine, au cap Mycale, situé entre l'île de Samos et la cité de Milet. Les perses sont appuyés par les milésiens et les samosiens, mais ils s'en méfient, sachant que ces derniers ne souhaitent rien plus que de s'affranchir du joug de l'envahisseur : Samos avait déjà donné plusieurs signes de confiance envers Athènes notamment, en rachetant plusieurs prisonniers athéniens aux perses, et en les renvoyant chez eux.


Une grande partie des navires perses est réduite en cendres en très peu de temps, et la bataille s'engage à terre. Le combat tourne court : apprenant la victoire des leurs à Platées, les grecs redoublent de courage et prennent rapidement l'avantage. Milet et Samos se soulèvent alors contre l'occupant perse, et plutôt que de les aider, les conduisent au devant des troupes grecques supérieures en force. C'est une nouvelle victoire écrasante : Mardontès et Tigrane, les généraux de l'infanterie perse, trouvent la mort, tandis que Artayntès et Ithamitrès, les deux commandants de la flotte, avaient déjà pris leurs jambes à leur cou !

Suite à cette nouvelle grande victoire, les grecs tiennent conseil et jurent que l'alliance ne sera jamais rompue : Samos, Milet, ainsi que d'autres îles s'étant soulevées contre l'occupation perse rejoignent la coalition panhellénique. La flotte reprend sa reconquête de la mer Egée pendant l'année suivante, jusqu'à l'Hellespont (actuel détroit des Dardanelles) : ainsi, en quelques mois seulement, les perses sont définitivement refoulés de la côte ouest de l'Asie mineure (Ionie) et des îles de la mer Egée (Lesbos, Chios...).

La paix de Callias & l'émergence d'Athènes

C'est 30 ans plus tard que le conflit entre la Perse et la Grèce se termine définitivement : Artaxerxès Ier, fils et successeur de Xerxès Ier, signe la paix avec Callias, un négociateur athénien envoyé par Périclès. Par cette signature, Artaxerxès s'engage à n'envoyer aucune troupe à plus de trois jours de marche de la mer Egée, et reconnaît implicitement la fin de la tutelle perse sur les cités ioniennes.

A l'issue de ces années de guerre, Athènes s'impose comme la plus importante puissance maritime de Grèce, influant sur toute la mer Egée et jusqu'en mer Noire. La coalition panhellénique ne durera toutefois pas très longtemps : la grande rivalité qui oppose Sparte et Athènes dégénérera quelques années plus tard, en 431, en une guerre qui durera près de 30 ans : la guerre du Péloponnèse.

finipe, 01h03 :: :: :: [10 méditations grotesques]

2 Décembre 2006 ::

« Scènes de cul »

:: Misanthropie

Le titre de ce billet a certes un caractère trivial, mais c'est toutefois le plus sobre que j'ai pu trouver, que les pisse-froid m'en excusent. Mais enfin, cette situation n'a que trop duré morbleu, je ne parviens plus à contenir ma consternation et ma lassitude à propos de ces scènes cinématographiques que l'on nomme couramment "scènes de cul".

Car en effet, qu'est-ce qu'une scène de cul ? Qu'y voyons-nous au juste ? Généralement, l'on y observe un homme et une femme assez peu vêtus (voire nus), dans un lit, et couverts tout au plus d'un fin drap de soie brillante, dont la couleur tend vers le rouge sombre, symbole probablement d'un certain érotisme trouble. Là, pêle-mêle, les corps s'entrechoquent et sont tantôt secoués de spasmes incontrôlables, tantôt agités d'ondes sensuelles et fluides, tantôt cathartiques d'extases indicibles, tandis que les amants se respirent bruyamment, s'enivrent des hormones âcres qui imprègnent la pièce, et poussent l'un un râle rauque, l'autre un gémissement lascif...

MAIS QUEL ENNUI ! Quel ennui que ces scènes cent, mille, dix mille fois rejouées avec des variantes allant du grotesque au pseudo poétique, et toujours pour aboutir à l'inéluctable et inévitable fin : un cri de jouissance, une main crispée sur un oreiller, et un drap souillé pour cause de purée balancée.

Non vraiment, il faudrait arrêter cette fâcheuse habitude de la sempiternelle et mal nommée "scène de cul" : si l'on veut voir des scènes de cul durant plus de dix secondes, autant regarder des films de cul, ou des films de fesse (le film de fesse étant interdit aux moins de 16 ans, là où le film de cul est interdit aux moins de 18).

Autrefois, ces scènes étaient astucieusement passées à la trappe, d'une sobre et efficace ellipse temporelle : l'on voyait l'homme se rapprocher de la femme, l'embrasser avec un feu et une passion inhabituels, parfois même l'on devinait un linge de soie fine glisser le long d'une épaule à la peau blanche, et c'était tout. La musique montait en un habile crescendo de violons, puis : fondu au noir. Et l'on savait pertinemment ce qui s'était passé, nul besoin d'aller filmer les détails anatomiques ni les performances sexuelles de chacun. La scène suivante se déroulait généralement le lendemain, au petit déjeûner, ou au saut du lit autour d'un café, ce qui permettait d'ailleurs de savoir si la nuit avait été bonne ou non (pour peu que cela ait son importance, après tout pourquoi pas).

Moi qui aime tant le cinéma chinois des années 60-70, je me satisfais amplement des scènes d'amour qui s'y déroulent, pendant lesquelles les marques d'affection les plus polissonnes consistent généralement en une main posée sur l'épaule (j'en frissonne encore tant c'est osé). La seule exception, c'est le réalisateur Chu Yuan, qui s'aventure à un peu d'érotisme parfois, mais toujours avec élégance, et en faisant toujours en sorte que cela ait un sens dans l'histoire (comme quoi je ne suis pas contre un bon film de Chu). Il n'empêche que cela n'affecte en rien le récit, au contraire : il reste plus de temps au film pour raconter d'autres choses plus intéressantes que le fait de savoir que tel ou tel personnage est un bon coup. On se fout royalement de ce qui se passe dans les alcôves obscures des ébats sexuels.

Finalement, une scène de cul, c'est un peu comme une coupure pub : ça permet d'aller pisser ou de débarrasser la table sans rater les scènes et dialogues pertinents d'un film.

finipe, 00h48 :: :: :: [2 élucubrations]