Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

Bigre, je me
ronge
les sangs !
Dans ton cul
De plus en plus, l'Humanité dévore amoureusement la morale. Ainsi, la piété filiale s'enrichit en rampant depuis la fin de l'existence
Cornille ::
Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

16 Novembre 2011 ::

« Sinistrose - 5 : miroir déformant »

:: Baratin

Ce billet fait partie d'un bien sinistre sujet de novembre qu'il vaut mieux éviter de lire et qui en comporte 7 :

Sinistrose 1 - Sinistrose 2 - Sinistrose 3 - Sinistrose 4 - Sinistrose 5 - Sinistrose 6 - Sinistrose 7


Tu la voyais pas comme ça ta vie,
Tapioca, potage et salsifis.
On va tous pareils, moyen, moyen...
La grande aventure, Tintin,
Moi aussi, j'en ai rêvé des cornemuses.
Terminé, maintenant. Dis-moi qu'est-ce qui t'amuse ?
(…)
Tu la voyais pas comme ça frérot
Doucement ta vie t'a mis K.-O.
T'avais huit ans quand tu t'voyais
Et ce rêve-là on l'a tous fait

Alain Souchon


J’ai surpris tout à l’heure une conversation entre ma fille et une de ses copines.
« Il y a eu ma mère, et puis j’en ai connu une, quand j’étais petite, elle avait trois enfants, et puis une autre, elle était docteur, et puis une troisième qui avait une fille, mais ça n’a pas duré longtemps, et puis il y a eu Machine… »
J’ai tendu l’oreille, craignant le pire.
Et comme presque à chaque fois que je crains le pire, on était en plein dedans. C’est marrant comme c’est la seule chose pour laquelle je ne me trompe pas.
Hélas, l’esprit finaud du lecteur de blog moyen l’aura déjà deviné : elle était bel et bien en train de réciter la longue litanie de mes « ex ».
Ma fille n’a que neuf ans, et à neuf ans, les doigts de sa main lui suffisent à peine pour dénombrer les nanas qu’elle a vu défiler dans ma vie… Je ne parle même pas de celles qu’elle n’a pas vues.

Une seule question me vient à l’esprit : comment ai-je pu en arriver là ?
Comment ai-je pu en arriver là, alors que s’il y avait bien un seul domaine où je n’étais pas naturellement destiné à devenir inconséquent, versatile et velléitaire, c’était bien celui-là ?
Comment ai-je pu en arriver là, moi le monogame impénitent qui avais (et aurai toujours) des bouffées de chaleur de stress à l’idée de tromper quelqu’un ?
Comment ai-je pu en arriver là, moi qui, une fois « en couple », deviens imperméable à toutes les stimulations extérieures, au point de ne même pas les voir, tel un autiste, et au point que ce sont généralement les autres qui me font alors remarquer que j’ai eu un « appel du pied », terme à la mode ces jours-ci…
Comment ai-je pu en arriver là, moi qui à 25 ans croyais encore à la relation unique, à perpet’, pour le meilleur et pour le pire ?
Comment ai-je pu faire ça, moi qui constate chaque jour les ravages que peut parfois occasionner sur les enfants l’instabilité affective de leurs parents ?
Comment ai-je pu faire ça, moi qui voulais tant donner à mes gosses un exemple à suivre, dans la mesure de mes humbles moyens ? Il faut croire qu’ils étaient encore bien plus humbles que je ne le redoutais.

Pourtant, c’était argumenté tout ça. Par moi, et par les autres.
Rester avec quelqu’un en étant malheureux, pour ses enfants, c’est pas bien. C’est bien connu : ils ne sont pas cons, ils s’en rendent compte. Si tu es malheureux, tu ne seras pas un bon parent. Et puis, ils peuvent comprendre, les gosses, faut pas les faire plus bêtes qu’ils ne sont ! Et puis aussi, ils ne seront pas toujours là. Un jour ils partiront de chez toi, et alors que feras-tu quand tu te retrouveras seul à te regarder en chien de fusil avec leur mère que tu auras supportée tant bien que mal pendant toutes ces années, rien que pour eux ? Tu auras même de quoi leur en vouloir, pour le coup.
C’est sûr, on a toujours un tas de bons prétextes pour dire que ce qu’on a fait, c’est ce qu’il fallait faire de toute façon.
Personnellement, tant qu’un ange ne m’apparaîtra pas en provenance directe de l’au-delà pour m’affirmer et me soutenir mordicus que ce que j’ai fait c’était bien, je serai toujours persuadé du contraire. Autant dire que c’est pas gagné, à moins que je ne sombre définitivement dans une schizophrénie hallucinatoire.

C’était réfléchi aussi. J’ai toujours entouré le processus de mille et une précautions. D’abord, j’étais persuadé qu’il fallait attendre avant de procéder aux « présentations ». Ne pas mêler notre innocente progéniture à une histoire qui pouvait capoter en quelques jours, quelques semaines ou quelques mois.
Mais seulement voilà, ça peut aussi, et même surtout, foirer après les dites présentations. Bah oui, un type avec deux gamines, même s’il n’a pas la garde, et même si elles sont plutôt mignonnes, ça peut être lourd parfois. On ne peut pas faire ce qu’on veut quand on veut.
Alors on se fout en rogne et après avoir transigé, après avoir accepté trop de compromissions, on finit par se dire qu’on doit nous accepter avec nos gosses, sinon rien. Mon sang bout encore dans mes veines de m’être parfois laissé traîner sur la pente funeste de négocier ce qui n’aurait en aucun cas dû être négociable.
Alors on prend le problème dans l’autre sens. On fait les présentations presque immédiatement, comme ça on est fixé, et on cache cette idylle aux marmots, pour quelques temps. Mais ça ne peut pas durer longtemps, car comme nous le disions, les enfants ne sont pas des billes. Et parce que c‘est particulièrement difficile d’être discret dans une idylle naissante.
Mais pour moultes et moultes raisons qu’il serait vain de vouloir énumérer ici, ce qui marche au début peut également foirer au bout de quelques semaines, quelques mois, quelques années…

Et j’en viens à penser que non seulement ça peut foirer, mais que ça doit foirer de toute façon. Autant dire que je suis sur la corde raide.

Comment ai-je pu en arriver là ?



Copyrat draleuq 2007

draleuq, 14h57 :: :: :: [3 sarcasmes grinçants]

:: COMMENTAIRES

 johnny cleg, le 17/11/2011 à 12h00

Je commençais à verser ma petite larme de compassion, et, avec de gros efforts de contraction du canal lacrymal, l'ai retenue ... quand j'ai vu la date de rédaction du billet !
OUF !! J'ai eu crè crè peur ... :)

 draleuq , le 17/11/2011 à 13h01

Mais oui, c'est une série thématique thymo-temporelle. Car c'est novembre, DONC on déprime. Plus que 13 jours à sinistroser, on tient le bon bout.
D'autant plus qu'en décembre, c'est Noël, DONC on est joyeux.

 johnny cleg, le 17/11/2011 à 13h57

J'ai entendu un simili casting des mois assez rigolo (mais que je vais dénaturer en le racontant), sur France Inter, chez Colin et Mauduit il y a quelques jours : les 12 postulants étaient là et on leur décrivait les profils de postes. Evidemment, personne ne voulait endosser le rôle de novembre parce que c'est le mois le plus pourri, où il fait froid, gris, sinistre. Alors pour remercier celui qui s'était dévoué en traînant lamentablement ses charentaises, on lui a offert deux jours fériés et des vacances. Finalement, c'est pas si mal, novembre ?!

Si l'administrateur de ce blog pouvait enlever le "t" qui s'est glissé dans mon précédent commentaire ...

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