Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

J'en ai
vraiment
rat le cul...
Dans tes
rêves
Parfois, l'ignorance répand irrémédiablement l'art, de sorte que l'Histoire s'enrichit, se précipitant vers le bonheur des sens
Jean-Sol Partre ::
Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

3 Mai 2007 ::

« Félix Faure, une mort en grande pompe »

:: Histoire contemporaine, 1899

Après les mésaventures de Paul Deschanel, je me devais de raconter celles de Félix Faure, président que j'ai plusieurs fois évoqué à propos notamment des divers scandales politico-financiers de la fin du XIXème siècle...




En cette fin du XIXème siècle, la vie politique française est particulièrement agitée : scandale du canal de Panamá en 1889, montée de l'anarchisme (le président Sadi Carnot est assassiné par un anarchiste en 1894), incident de Fachoda avec l'Angleterre, et surtout, affaire Dreyfus, qui divise la France en deux camps farouchement opposés.

Février 1899 : Félix Faure est le président de la République depuis cinq années. Alors âgé de 58 ans, républicain modéré, il se distingue surtout par son inaction et son inexistence sur la scène politique, ainsi que par son goût immodéré du faste et des cérémonies somptueuses, à tel point qu'on le surnomme parfois le "président Soleil"... Il est d'ailleurs à ce propos très fréquemment raillé par la presse, qui s'adonne avec joie à la satire la plus cruelle. Félix Faure est en outre un antidreyfusard, ou du moins s'il ne s'en réclame pas publiquement, il s'est opposé à la révision du procès d'Alfred Dreyfus, suite à la lettre ouverte qu'Emile Zola lui avait adressée dans le journal l'Aurore, le célèbre « J'accuse...! », ce qui a d'ailleurs valu à son auteur un exil en Angleterre pour échapper à la prison.


Félix Faure, 7ème président de la République française

Le 16 février de cette année 1899, en fin d'après-midi, le président de la République Félix Faure se trouve à Paris, au palais de l'Elysée : il est en compagnie de sa maîtresse, une certaine Marguerite Steinheil, qu'il fréquente depuis près de deux ans. Elle est mariée à un artiste peintre qui l'ignore et qu'elle ignore en retour, et est une figure mondaine importante de la vie parisienne, recevant divers membres de la bonne société dans son salon.

Soudain, la cloche retentit et les domestiques accourent : le président est allongé sur son lit, haletant et suffoquant, tandis que Marguerite Steinheil se rhabille avec précipitation. On porte secours à l'infortuné, et l'on fait sortir par une porte dérobée l'embarrassante et embarrassée maîtresse. Après quelques heures d'agonie, Félix Faure meurt, d'une congestion cérébrale.

Bien sûr, la mort du président donne lieu à divers commentaires et suppositions de la part de la presse et des personnalités du moment. Clémenceau en particulier, alors avide de revenir au devant de la scène après en avoir été évincé quelques années, aurait eu la spirituelle déclaration suivante au sujet de feu le président Faure : « Il s'est voulu César, et il est mort Pompée ». Marguerite Steinheil quant à elle, même si l'on ignore son identité à ce moment précis, est rapidement surnommée par la presse « La Pompe funèbre »[1].

Ainsi entre Félix Faure dans la postérité, malgré l'insignifiance de son action politique en tant que président !


_________________________________
1. Les rocambolesques aventures de cette Madame Steinheil ne s'arrêteront pas là : en 1908, elle trempe dans un nouveau scandale, après qu'on l'ait découverte ligotée chez elle, son mari et sa mère tous deux morts. Une sombre affaire de vol d'un collier prétendument offert par le défunt président Faure est au coeur de cette histoire, et le procès fait grand bruit en 1909, pour se terminer par un acquittement, malgré un réquisitoire incendiaire et un tissu de mensonges et de versions contradictoires de l'accusée. A ce jour, l'on ignore toujours les tenants et aboutissants de cette affaire, qui fut successivement mise en rapport avec l'affaire Dreyfus, la mort du président Faure, ou encore la possible présence d'un grand duc de Russie chez Madame Steinheil.

finipe, 00h20 :: :: :: [5 éclaircissements pompeux]