Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

Pour votre santé, évitez de grignoter
C'est pas faux
En vérité je vous le dis, la Femme ignore amoureusement le règne animal. C'est pourquoi la perfidie s'évade, se précipitant vers l'extase de l'existence
La Rochefaucud ::
Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

22 Septembre 2010 ::

« Liberté chérie - 2ème partie »

:: Baratin

Ce billet fait partie d'un sujet qui en comporte deux :
1. Liberté chérie - 1ère partie
2. Liberté chérie - 2ème partie


Les abus de la liberté tueront toujours la liberté

André Maurois (« Mémoires »)

Réglementer, légiférer, prescrire, proscrire, prohiber, interdire, légaliser…

Bien souvent, toutes les règles, prescriptions, interdictions dont la liste s’allonge chaque jour un peu plus, ne sont que la conséquence de l’incivisme de nos concitoyens.
Par exemple, autant il peut sembler logique d’interdire de faire un feu de camp dans une forêt ou une garrigue en plein été, autant un feu de plage, vous l’avouerez, a tout de même de maigres chances d’aboutir à un incendie. Pourtant, c’est interdit et passible d’une forte amende. Mais quoi de plus normal que de le proscrire, puisque la plupart du temps ce feu convivial va s’additionner d’une beuverie avec force tessons de bouteilles qui trancheront les pieds tendres des enfants plagistes du lendemain.

Cela dit, il ne faut pas non plus fumer dans les lieux publics, rouler bourré, jeter ses ordures dans la nature, laisser ses lumières allumées, laver sa bagnole et arroser sa pelouse en pleine canicule. Et là, allez savoir pourquoi, alors que ces règles là sont difficilement contestables, parce que justement elles nuisent à la liberté d’autrui, liberté à respirer un air non vicié, liberté de circuler sans risquer de mourir par la faute d’un inconscient, liberté de vivre dans un environnement non pollué, liberté de pouvoir jouir de suffisamment d’eau potable… Allez savoir pourquoi, ces règles-là, justement, légion sont ceux qui ne les appliquent pas.
Par contre, donnez leur des tombereaux de règles débiles, et tous les moutons s’empresseront de les appliquer dans la lettre, et surtout pas dans l’esprit. Avec le plus grand zèle.
Vouloir tout régenter et tout réglementer, vouloir légiférer sur tout, voilà à quoi ça nous mène.

La liberté ou la mort

Nous vaincrons ou nous mourrons ici
De la douce mort des hommes libres

E. Moritz Arndt ("Vaterlandslied")


La liberté est peut-être la seule cause, la seule idée pour laquelle je me sacrifierais, ou en tous cas risquerais ma vie. Pour le reste, comme disait Brassens, mourir pour des idées, d’accord, mais de mort lente. D’accord, mais de mort len-en-en-en-teuh…

Feu mon bien-aimé grand père me traitait d’anarchiste, mais il n’y avait ni colère, ni reproche dans sa voix. C’était plutôt un mélange d’incompréhension, d’attendrissement, et peut-être même d’envie.
J’ai toujours été une sorte d’électron libre, alternant selon le sujet l’hyper discipline et l’hyper indiscipline. Si j’avais eu le malheur de faire un service militaire « classique », j’aurais certainement passé dix mois au gnouf. Par contre, quand je vois un type prendre le volant avec 2 g. d’alcool dans le sang, j’ai envie de lui flanquer mon poing à travers la gueule.

Je ne supporte pas qu’on me fasse de reproches sur ma manière de faire les choses, de voir les choses et encore plus sur ce que je suis. Mais je peux me le permettre, car jamais je ne reprocherai à quelqu’un sa manière de faire ou de voir les choses, ou ce qu’il est. Je défends ma liberté tous ergots dehors tant que je sais qu’elle n’empiète pas sur celle des autres.

Quelqu’un était persuadée que si j’étais à ce point rétif aux reproches et aux exigences d’autrui, c’est parce que j’avais conservé un traumatisme infantile vis-à-vis des principes éducatifs haut placés de mes parents, qui se serait donc traduit par une sorte de rejet phobique et pour ainsi dire viscéral de toute forme d’autorité et de réprobation.
Par contrecoup, je serais devenu trop permissif avec mes gosses. Une sorte de soixante-huitard très attardé en quelque sorte. Si on leur demandait leur avis, je doute pourtant que les principales intéressées seraient d’accord.

Liberté et responsabilité

La liberté, ce n’est pas la liberté de faire n’importe quoi, mais le refus de faire ce qui est nuisible

Alexandre Minkowski (« Une certaine idée de la médecine »)


Je ne supporte pas le flicage, sans doute aussi parce que je n’en ai pas besoin.
Dans un monde sans flics, sans code pénal, sans code civil, sans contraintes artificielles, abusives et inutiles, je ne me mettrais pas pour autant à rouler à 100 à l’heure dans des ruelles piétonnières, à insulter les gens dans la rue parce qu’ils ont une tête qui me revient pas, à frapper ma femme, à martyriser mes enfants, à me servir dans les magasins sans payer, à arrêter de dire bonjour, au revoir, merci ou s’il vous plait. Tout juste peut-être pourrais-je être tenté de torturer mon chat. Et encore…

Cela ne pourrait qu’améliorer ma situation. Je pourrais continuer à faire savoir poliment mais franchement ce que je pense à tout le monde, même aux chefaillons, sans craindre les mesquines et médiocres représailles de ces gens qui ont le « pouvoir », mais qui l’ont souvent trouvé dans un paquet de Bonux, ou en léchant des culs, voire en léchant des culs dans un paquet de Bonux.

Je ne supporte pas le flicage, c’est vrai. Je me souviendrai toujours de cette profonde impression de malaise que j’ai eue lorsque je suis allé visiter Londonderry en Irlande du Nord, et que j’ai vu toutes ces caméras, ces miradors, ces barbelés, ces marquages de territoires, ces tags vindicatifs. C’était pourtant après la guerre civile.

Alors oui, je redoute de voir fleurir des caméras partout, même si y’en a un qui nous claironne que c’est pas un problème et que c’est pour la sécurité de tous. Non, j’aime pas l’idée qu’on puisse être espionné au téléphone, sur le web. Et oui, ce que j’aime pas dans Paris, c’est qu’on peut y voir un car entier de CRS, pas parce qu’il y a un risque d’émeute, mais juste parce qu’on leur a ordonné de rester là, au cas où… Et oui, cette image me choque.

Mais tout ça c’est de la faute des autres. Ceux qui ne mettraient pas plus d’une heure à transformer un monde sans flics en enfer terrestre.

L’enfer c’est les autres

J.P. Sartre (« Huis Clos »)

Des objections ?

Certains me diront qu’on n’a pas à se plaindre car il existe des endroits où il n’y a pas du tout de liberté. Certes. Mais cette réponse n’est pas plus satisfaisante que celle qui consiste à dire que les pauvres qui mangent aux restos du cœur n’ont pas à se plaindre, vu qu’en Afrique il y a des gens qui crèvent carrément de faim.

D’autres diront que c’est incohérent de tenir de pareils propos alors que je fais un métier où je dois moi-même fliquer, et d’ailleurs beaucoup plus souvent que je ne le voudrais, ces chères têtes blondes en devenir. Je leur réponds que s’il y a un moment où le faire, et le plus intelligemment possible, c’est bien maintenant, et que si un jour, une fois eux adultes et moi vieillard ou mort, ils peuvent eux aussi dire en bombant la poitrine : « moi, j’aurais pas besoin de flics pour vivre dignement »… alors j’aurai un peu gagné.

Copyrat draleuq 2007

draleuq, 13h42 :: :: :: [12 critiques dithyrambiques]

20 Septembre 2010 ::

« Liberté chérie - 1ère partie »

:: Baratin

Ce billet fait partie d'un sujet qui en comporte deux :
1. Liberté chérie - 1ère partie
2. Liberté chérie - 2ème partie


Ce qu’on appelle liberté, dans le langage politique, c’est le droit de faire des lois, c’est-à-dire d’enchaîner la liberté.

Auguste Vermorel (« le petit socialiste »)


Bon vent Jeannot !

J’avais un collègue vraiment sympa qui s’appelait Jean. C’était un enfoiré de fonctionnaire comme moi, un peu gauchiste, un peu râleur, un peu en colère après les iniquités de l’administration, peu préoccupé de ne pas penser et de ne pas faire comme tout le monde.
Il est parti en retraite l’an dernier, et aussitôt après il a quitté la France pour s’en aller vivre dans le pays d’origine de sa femme, à Madagascar.
Juste avant son départ, il me confia un jour qu’il en avait assez de la France, « ce pays où on ne pouvait plus rien faire ».

Dans l’instant, je l’ai trouvé un peu culotté, le Jeannot. Il parlait d’un des pays les plus libres du monde, merde quoi. Où on a la liberté d’expression, de réunion, syndicale, de grève, de circulation…
Et puis après, à bien y réfléchir, j’ai un peu mieux compris ce qu’il voulait dire.

Liberté professionnelle

C’est vrai qu’on ne peut plus rester seul avec un gamin dans une classe, que ce soit pour lui expliquer quelque chose qu’il n’a pas compris ou pour l’engueuler. Du coup, tout le monde est rapidement au courant de la connerie qu’il a faite.
On ne peut plus lui mettre notre pied au cul, remarquez dans le fond c’est pas un mal. N’empêche qu’il en est quelques uns à qui ça ferait le plus grand bien.

On ne peut pas laisser cette cabane en bois là, un gamin pourrait grimper sur le toit et tomber. Idem pour le circuit de billes, il pourrait trébucher dessus et s’y fracasser le crâne… Je repense à nos cages à poules de 3 mètres de haut dans les années 70. Je pense aux passerelles suspendues à 5 mètres de haut au dessus d’un pauvre bac à sable, avec une vulgaire corde en guise de garde-fou, dans les années 50.
C’est sans doute arrivé, mais personnellement j’ai jamais vu personne partir à l’hôpital quand j’étais môme. En tant que directeur, si. Il faut faire quoi ? Tapisser entièrement la cour de tapis de mousse imperméables ?

Il est interdit désormais d’éveiller l’intérêt des enfants pour la lecture avec des phrases, voire des textes. Quelle horreur ! Ça pourrait avoir un sens pour eux. Mieux vaut leur faire déchiffrer des longues suites de ba-be-bi-bo-bu, c’est tellement plus captivant.

Plus question de faire du camping avec une classe, parce qu’il faut un centre agréé, un ****. Il faut que ces chérubins pètent dans la soie, et ne chient pas à la Turque, ils se retiendraient jusqu’à l’occlusion intestinale, pardi. En colo, on peut encore, mais c’est la réglementation jeunesse et sports, c’est pas pareil. Le taux d’encadrement est différent aussi. D’où sans doute la bonne vieille vanne sur le « pourcentage » qu’on aurait le droit de perdre dans une colo.

Liberté de circulation

Il est interdit de sortir des sentiers balisés, ça nique la flore. Pas question de grimper dans les dunes, ça les abîme. Des forêts entières sont des propriétés privées, sans parler des plages privées, absolument hors-la-loi, qui entendent se moquer de la règle dite du « chemin des douaniers », qui exige qu’une bande d’une certaine largeur sur le littoral soit accessible au public, en particulier pour des raisons de surveillance des côtes.
Pour la surveillance, oui. Pour pouvoir s’y promener, non.

On ne peut pas aller quelque part pour voir quelqu’un ou faire quelque chose sans être obligé de réfléchir à quel trajet on va devoir faire, à quel moment de la semaine et à quelle heure du jour… au risque de se retrouver embourbé dans un embouteillage sans fin de gens qui l’ont tous bien cherché en voulant faire la même chose que tout le monde au même moment.
L’homme a organisé partout la vie de façon à s’ajouter sans cesse de nouvelles contraintes. Dans nos villes et à leur pourtour, la notion de « libre circulation » prête de plus en plus à rire.

Depuis peu, on n’a même plus le droit de se rassembler dans les halls d’immeubles.
Normalement, on ne peut même pas dormir à la belle étoile. Les clochards sont donc tous des hors-la-loi en puissance.

Liberté de logement

On ne peut pas acheter une maison, c’est souvent trop cher. Même quand on est salarié et qu’on a un « travail à responsabilité ». Il est pourtant formellement déconseillé d’avoir des responsabilités, c’est des coups à se retrouver en taule ou à rembourser toute sa vie les conneries des autres, ceux qui ne les avaient pas, les « responsabilités ».

Alors puisqu’on ne peut pas acheter de chez soi, il faut engraisser un proprio. Et pour peu que l’endroit où on bosse soit plus ou moins touristique, on ne peut pas du tout y habiter, même en location. Toutes les baraques sont monopolisées comme résidences secondaires par les rupins et les Anglais qui ne les habitent que deux mois par an.

Liberté de rester en bonne santé

Même la liberté de bouffer sans s’empoisonner nous échappe progressivement, à moins d’avoir les moyens de n’acheter que du biologique, et encore. Il ne faut pas manger des produits préparés, qui sont comme chacun sait bourrés d’additifs cancérigènes.
Il faut même se méfier de la viande de bœuf depuis qu’on a eu la bonne idée de décider que les bovins ne seraient plus seulement herbivores ainsi que la nature l’avait déterminé.

Liberté d’expression

Il ne faut pas critiquer Israël, c’est de l’anti-sémitisme, mais il ne faut pas non plus critiquer les Palestiniens, c’est du racisme. Il ne faut pas caricaturer Mahomet, c’est de l’intolérance. Et surtout pas dire que Le Pen est un gros connard, c’est lui faire de la pub.
La liberté d’expression n’est qu’une douce illusion : on peut à peine dire quelques vérités dérangeantes sans avoir tout un bataillon d’avocats au cul.
La faute aussi aux journalistes qui en ont fait un peu n’importe quoi, de leur liberté d’expression.
D’une manière générale, la faute aux gens qui font n’importe quoi de leur liberté.

Voilà, tout ça n’est pas exhaustif bien entendu.
Et je me dis que si un gars comme Jean, qui a vécu 25 ans de plus que moi, a ressenti tout au long de sa vie d’adulte une érosion de sa liberté, ce n’est quand même pas un hasard.

Copyrat draleuq 2007

draleuq, 17h36 :: :: :: [0 déclaration infondée]

17 Septembre 2010 ::

« Chérie, une petite skodomie ? »

:: Paparatzi

On sait bien que les publicités ne sont pas toujours de bon goût, qu’elles soient par affiches, télévisées ou radiophoniques. Mais il faut avouer que certaines d’entre elles sortent carrément du rang.
C’est le cas d’une pub Skoda qui me hérisse les cheveux sur la tête depuis plusieurs jours à la radio. De mémoire, je vais vous en reproduire ici le texte quasi intégral :

« Françoise est un peu claustrophobe, alors son mari a dû renoncer à un certain nombre de ses fantasmes : l’ascenseur, la douche, la cabine d’essayage, et même la voiture !
Heureusement, Françoise va acquérir le nouveau monospace Skoda grâce à l’offre spéciale de reprise de son ancien véhicule à l’argus plus 2 000 €.
Quelle coquine, cette Françoise ! »


Parfois, le mauvais goût peut être drôle, c’est la seule chose qui peut nous le faire tolérer. Mais il faut avouer qu’en plus d’être de mauvais goût, ce spot est d’une nullité crasse.
On a l’impression que le responsable marketing de Skoda a passé une commande à son agence de publicité : « et n’oubliez pas, hein, je veux DU CUL ! » et que les publicistes n’étaient pas du tout inspirés pour faire une pub de bagnole qui parle de cul, et qu’ils n’ont rien trouvé de mieux que ça.

Renseignements pris, la marque Tchèque n’en est d’ailleurs pas à son premier essai en matière de sexy-marketing. En effet, voyez ci-dessous une des pages du calendrier Skoda 2006. Il y en a 11 autres dans le même genre.



On peut imaginer la prochaine étape, qui pourrait être une petite modification du logo de la marque.


Avant... Après... :)


Copyrat draleuq 2007

draleuq, 17h42 :: :: :: [6 divagations]

8 Septembre 2010 ::

« Pour une vie de couple moderne et indépendante... »

:: Baratin

La seule façon de réussir la vie à deux, c’est de faire chambre à part, d’avoir des appartements séparés, de ne jamais manger ensemble et de ne surtout pas prendre ses vacances en même temps.

Jean Yanne


L'indépendance, moi, je suis pour...

Déjà, je bosse 27 heures par semaine minimum. Le travail, c'est comme l'indépendance, je suis pour. Non seulement ça rapporte de l'argent, mais ça me permet de ne pas voir ta gueule 27 heures par semaine minimum, toi, femme, et c'est toujours ça de gagné.
Et c'est pas tout ! Je suis directeur, moi, madame... Pourquoi donc d'après toi ? Tu ne t'es jamais posée la question ? Pour l'argent ?... Oulala, ce serait un bien mauvais calcul : 10 à 15 heures supplémentaires par semaine pour 600 balles, c'est pas cher payé. La vraie raison est simple : ça fait encore 10-15 heures par semaine de moins à voir ta gueule.
C'est pourtant simple, c'est même mathématique.

Pause méridienne

Le midi, une heure 35 de pause, qu'est-ce que ça passe viiiiiiite !!! A peine le temps de faire caca... Surtout qu'on va faire en sorte d'habiter un peu à l'extérieur de la ville, histoire de ne pas être tenté de rentrer le midi. Trop de temps perdu dans les transports, et puis trop chère l'essence, l'inflation ma pauv'dame. Autant manger un sandwich au bureau et s'avancer dans son travail.
Si on bosse tous les deux dans le centre ville, il faudra trouver autre chose pour ne pas se voir. C'est facile : si on se voit le midi sans rentrer à la maison (qui est trop loin, comme chacun sait), il va falloir manger au resto (mauvais pour le budget du ménage) ou au Mac Gerbal (très mauvais pour la ligne).
Donc c'est bien ce que je disais, une pomme et au boulot, c'est le mieux pour tout le monde.

Réduction des Trises de Tête

Le mercredi, généralement, je ne travaille pas. Tu as sûrement des RTT, et peut-être envisages-tu de prendre un temps partiel à 80%. Je n'ai rien contre, après tout c'est ton droit le plus strict, mais à une seule condition : pas le mercredi. Si j'ai choisi un taf avec les mercredis de libres, c'est pas pour avoir une grognasse dans les pattes !
Si tu veux prendre des RTT, tu les prends quand tu veux, mais quand je bosse ! T'as que l'embarras du choix entre le lundi, le mardi, le jeudi et le vendredi ! Et puis le temps partiel, si tu veux mon avis, laisse tomber, c'est un manque à gagner sur ton salaire et comme je suis un sale con, ne compte pas sur moi pour participer à le combler... Chacun sa merde !

Bosser le samedi matin, c'est bien

Le samedi matin, généralement, je travaille, et toi non. Le bénéfice le plus évident, naturellement, c'est que ça fait encore une demi-journée sans se voir. Mais il y a un autre bénéfice, moins apparent, mais peut-être plus important encore : bosser le samedi matin, ça te nique ton week-end...
Imagine : si on avait nos week-end entiers à partir du vendredi soir, on pourrait être tentés de partir tout le week-end, à l'hôtel, je ne sais pas où, ce qui veut dire que pendant 48 heures ou presque je ne verrais que toi et toi tu ne verrais que moi : L'HORREUR !..
Alors que là pour un jour et demi, l'excuse est toute trouvée : "boah, ça vaut pas le coup pour si peu de temps !"... et le tour est joué, on peut passer le week-end à vaquer chacun à nos activités.
On pourrait faire un planning pour savoir qui occupe la maison, qui occupe le jardin et qui sort, par demi-journée ou même par tranches horaires... Qu'en penses-tu ?

Le sport, c'est bon pour la santé du couple

Le soir, ce n'est qu'un tout petit peu plus ennuyeux. Mais j'ai plus d'une corde à mon arc...
D'abord, je fais du sport, donc il faut s'entraîner. Ça fait une soirée de gagnée, euh, de foutue. Ça dure jusqu'à 22 heures, et après, c'est bien connu, les sportifs ça picole et ça raconte des histoires de cul dans les vestiaires. Bref ! Faut pas compter être revenu avant 23 heures, tu seras couchée depuis longtemps. Je vais quand même pas te réveiller, c'est pas du respect. Et voilà... Même pas obligé de baiser, que demande le peuple ?
Et puisqu'on en parle, je compte faire de la compétition pendant quelques années encore, ça veut dire pas mal de dimanches après-midi occupés, et quand c'est en déplacement, c'est mieux, c'est encore plus long. Si on compte la troisième mi-temps, ça fait bien trois-quatre heures de gagnées. Et puis surtout te sens pas obligée de venir me soutenir. Je sais que ça te gavait d'aller voir ton ex en concert, on est grands maintenant, on a passé l'âge de ces minauderies, hein... Et puis comme ça si je joue comme un tocard, mon honneur est sauf, je peux quand même te dire que j'ai marqué trente points en rentrant à la maison !
Et quand je serai à la retraite, oh bah t'inquiète pas, je trouverai toujours une excuse pour y aller quand même. Un match à voir, ou à arbitrer... The show must go on !

Soirs sans se voir, espoir

Mais revenons aux soirs : comme chacun sait, je suis prof. Un prof, ça travaille le soir, en tous cas certains soirs. Bon, c'est vrai qu'en période creuse, je réussis à faire mes préparations de classe le lundi et le mardi, et mes soirs sont libres. Mais bon, y'a que moi qui le sais... Si je m'enferme dans le bureau en disant "je dois préparer ma classe", qui ira vérifier ? Certainement pas toi, t'auras autre chose à faire. Faut quand même pas oublier que t'es une bonne femme : ménage, repassage, vaisselle, rangement, pliage, c'est que ça prend du temps, tout ça... Tu feras quand même attention de ne pas faire de bruit pour ne pas me déranger dans mes activités intellectuelles qui nécessitent le plus haut niveau de concentration. L'aspirateur, c'est uniquement le samedi matin quand je suis pas là, j'insiste.
Toi parfois tu auras des séminaires de formation, deux jours, voire une semaine. Un vrai petit bonheur de la vie, des vacances avant l'heure ou presque !

Vacances à deux, fatigue fois deux

Abordons maintenant l'épineux sujet des vacances. Si tu as un enfant d'âge scolaire, tu voudras prendre quelques vacances en même temps que lui, donc en même temps que moi, c'est légitime. J'avoue que nous ne pourrons pas y couper. Mais bon, tu n'as que six semaines par an, donc jamais plus d'une semaine d'affilée pendant les petites vacances, qui ont lieu à la Toussaint ou en hiver, il fait un temps dégueu, c'est pas une bonne saison pour partir. Avec quelques artifices de procédure, ça devrait passer sans trop de peine.
Pour l'été, ça se gâte, il y a les vacances familiales, passage obligé... Il faut sauver la face. J'ai déjà une boule derrière ma voiture, il ne manque plus que la caravane. Si tu as un enfant, tu auras sûrement aussi un hamster... Moi je me charge d'acheter le chien...
Mais là où ça devient intéressant, c'est pour l'autre mois de vacances estivales. Je te rappelle que je suis directeur de colo... Là encore, il ne faut pas compter là dessus pour faire une forte plus value salariale, mais par contre, quinze jours, voire trois semaines sans voir ne serait-ce que ton ombre... Pour ce tarif là, je serais prêt à diriger une colo gratuitement. Si je suis juste défrayé, ça me suffira amplement...
Ah ouais, franchement, l'indépendance, c'est que du bonheur.

Résidus de bénéfices

Il restera juste quelques toutes petites plages horaires creuses de temps en temps, histoire de soulager les pulsions bestiales, de pouvoir aller au resto ou au cinéma sans être tout seul comme un con, d'avoir quelqu'un à appeler pour nous dépanner si on est dans la merde, de pouvoir s'occuper si la piscine est fermée pour nettoyage ou si TF1 et M6 sont en grève...
Et pour le peu de temps qu'il reste, ça devrait quand même aller à peu près...


Copyrat draleuq 2005, sous le titre original de "Pour une vie de couple moderne et indépendante, ou comment être sûr de (ne pas) divorcer", mais je suis obligé de raccourcir sinon le Lion va encore me dire que je sème le chaos, toussa toussa...

draleuq, 17h16 :: :: :: [3 commentaires désobligeants]

4 Septembre 2010 ::

« Le réel et le perçu »

:: Baratin

Homines id quod volunt credunt
(Les hommes croient ce qu'ils désirent)
Jules César


Prenons donc quelques minutes en ce beau jour pour faire un peu de philosophie à un euro cinquante.
L’autre jour, je rentrais chez moi après une journée bien remplie lorsque je remarquai que la première chose que l’on voyait en arrivant, juste en face de la porte d’entrée, était une étagère, et que sur cette étagère, on pouvait admirer ce piteux spectacle :


Poursuivant ma réflexion, je me disais donc qu’il y avait deux manières d’interpréter ceci.
D’une part, la conclusion probable d’un visiteur qui ne me connaît pas : « eh beh, c’est un sacré alcoolo celui-là ! »
D’autre part, la conclusion probable de quelqu’un qui me connaît : « il jette les bouteilles de verre au recyclage une fois par an »

Eternel débat que celui du réel et du perçu, au moins aussi éternel que celui de l’inné et de l’acquis[1]. Eternel, et j’ajouterai insoluble.
Il est bien entendu de notoriété publique que nos sens sont d’une médiocrité rare.
Nos yeux ne voient déjà pas grand-chose le jour, sans parler de ce qu’ils voient la nuit, et là je n’évoque même pas les myopes, hypermétropes, astigmates et autres presbytes.
Notre ouïe est déplorable, notre odorat lamentable, notre sens tactile est risible. Quant à notre goût, il est fort limité. Si vous voulez mon avis, même si cela ne se discute pas, il y en a même qui ont vraiment des goûts de chiotte.
Tout cela est parfaitement adapté à notre style de vie, bien sûr. Peu de gens aimeraient vivre avec une hyperesthésie qui leur ferait sentir le moindre frottement de chemise sur leur peau. Peu de gens aimeraient entendre le détail des conversations de leurs voisins (certains les entendent, mais c’est plus dû à l’épaisseur du placo qu’à leurs sens surdoués). Enfin si, ils trouveraient ça drôle. Pendant un temps du moins. Peu de gens aimeraient avoir une vue microscopique qui leur permettrait d’admirer les monstrueux acariens aux pinces crochues et au rostre préhistorique qui grouillent sur leur oreiller, ou les répugnantes bactéries qui se tortillent à la surface de leur épiderme.

Le peu que nous percevons doit ensuite encore passer par le prisme déformant de nos émotions, de notre expérience vécue, de nos interprétations, de l’influence sociale des autres[2], de nos représentations mentales, et de là de nos a priori et autres préjugés (c’est une spécialité de l’espèce), sans oublier nos désirs, envies, fantasmes…
D’après le très peu que j’en sais, ou plutôt que j’en crois savoir, car mon observation est forcément fausse, c’est là qu’il faut chercher cette incroyable difficulté qu’ont les gens à communiquer avec les autres, à s’entendre avec les autres, et, but ultime (ou, de plus en plus souvent, improbable chimère), à être suffisamment sur la même longueur d’onde que quelqu’un pour pouvoir envisager un seul instant de rester avec lui/elle (j’ai dit un gros mot, je sais). Mais nous reviendrons une autre fois sur cet aspect particulier du problème.

En bref, le réel nous est définitivement inaccessible, et c’est sans doute mieux comme ça.
On ne devrait d’ailleurs même pas avoir le droit d’utiliser ce mot. Même les scientifiques ne connaissent rien du réel, même quand ils isolent une variable en laboratoire. Toute observation, même neutre, même dénuée d’affects, est effectuée par un homme, et est donc par définition fausse. Les animaux eux, au moins, ne se masturbent pas le cerveau avec ce genre de question : ils ne raisonnent que sur le perçu, pas sur le réel, dont ils ignorent jusqu’à l’existence. D’ailleurs, ils ne raisonnent pas du tout, les veinards.

Le mot réel doit donc être purement et simplement rayé de notre vocabulaire, comme ça : réel
Si vous avez bien suivi, vous comprendrez sans mal que ce que vous venez de lire n’est pas réel. Oubliez-le donc.

Copyrat draleuq 2007

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1. Loin d’être démodé, ce débat a encore fait récemment rage lorsque notre vénérable président Sarkozy a « incliné à penser qu’on naît pédophile ».

2. Une célèbre expérience de psychosociologie, dite « expérience du point bleu », consistait à inviter un sujet X que l’on mélangeait à un groupe de 5 autres sujets soi disant invités dans les mêmes conditions que X, mais en réalité complices de l’expérimentateur. Ce joyeux groupe de 6 personnes était ensuite introduit dans une salle obscure où un point lumineux, en principe incontestablement de couleur bleue, était projeté sur un écran. Les sujets devaient se concerter pour décider de quelle couleur était ce point. Les complices avaient pour consigne d’affirmer que le point était vert. L’expérience montra que dans plus de 90% des cas, le sujet X se rangeait derrière l’avis des autres sans la moindre protestation, préférant se découvrir secrètement un daltonisme subit plutôt que de passer pour un con auprès de ses congénères.

draleuq, 13h03 :: :: :: [1 cri de désespoir]