Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

Je suis
fait comme
un rat !
C'est ce qu'on dit
Parfois, l'ignorance décroche affreusement la démocratie. Ce faisant, la vie s'enfuit, immobile depuis les cieux des sens
Jean-Sol Partre ::
Le lion & le rat (Le Tref & l'Aucube)

26 Avril 2011 ::

« Antonin, ou l'apogée de l'Empire Romain »

:: Histoire antique, 138

Originaire de Nîmes (Nemausus) par son père, Antonin, né en 86, fit une brillante carrière politique avant d'être adopté par l'Empereur Hadrien, en 138, juste avant la mort de ce dernier, la même année.
En effet, celui qu'Hadrien destinait à devenir Empereur venait de mourir lui-aussi, et ses deux autres favoris, Marc-Aurèle et Lucius Verus, étaient trop jeunes pour accéder au trône.
Aussi, Hadrien adopta Antonin et le désigna donc pour lui succéder à la condition expresse qu'il adopte lui-même Marc-Aurèle et Lucius Verus. Il pensait probablement qu'Antonin, déjà âgé, ne régnerait pas longtemps. Pourtant il régna 23 ans, jusqu'en 161.


Buste d'Antonin le Pieux (British Museum)


Cette coutume pour l'Empereur de ne pas désigner forcément son fils naturel comme successeur, mais d'adopter pour l'occasion la personne qui lui semblait la plus compétente et la plus qualifiée pour s'acquitter de ce rôle, avait contribué à faire la grandeur de Rome, après une période où la coutume dynastique avait entraîné une décadence transitoire.
Nous mêmes en France avons bien connu ce problème, beaucoup plus tard, quand des Rois parfois très brillants furent remplacés par leurs fils incompétents, voire fous ou à demi débiles.

Les historiens considèrent classiquement le règne d'Antonin comme l'apogée de l'Empire Romain. En tous cas, ce qu'il est facile de mesurer, c'est que ce fut l'apogée de son extension territoriale, tout autour du bassin Méditérranéen.


Les thermes d'Antonin, à Carthage [1]. C'est le vestige le plus complet et le plus impressionnant de la période Romaine de la cité nord-africaine. Ils portent le nom de l'Empereur Romain régnant à l'époque. La technologie employée pour y chauffer l'eau était révolutionnaire. Derrière à gauche, en blanc, la résidence du désormais ex-Président à vie Ben Ali, successeur depuis 1987 du Président à vie Bourguiba, qui avait mis fin, en 1956, à la fois au protectorat français et à la dynastie beylicale. Au moment où j'ai pris cette photo (2005), il était interdit de photographier la dite résidence.

Au Nord, en Bretagne (c'est-à-dire l'actuelle Grande-Bretagne), il fit construire un mur de tourbe pour se prémunir des invasions des pictes (les Celtes qui peuplaient l'antique Ecosse et qui marquèrent les esprits des Romains car ils attaquaient nus, recouverts de peintures de guerre bleues, les cheveux dressés sur la tête avec de la chaux). Ce mur prit son nom, et s'ajouta au Mur d'Hadrien, plus au sud, qui avait été construit par son prédecesseur.


Vestiges du mur d'Hadrien
(source : http://bill.et.marie.over-blog.com)



Les vestiges du mur d'Antonin, qui n'était pas fait de pierres comme le Mur d'Hadrien,
mais de tourbe, sont beaucoup plus rares.



Localisation des murs. Celui d'Antonin fut abandonné dès la fin du IIème siècle, sur l'ordre de l'Empereur Septime Sévère, devant la pression des Pictes. Il préféra faire renforcer celui d'Hadrien qui fut progressivement abandonné au Vème siècle

Partout ailleurs, il n'entreprit aucune nouvelle conquête, et n'eut à déplorer aucune révolte majeure dans les différentes provinces sous administration romaine. Il n'y eut aucune guerre dans l'Empire pendant ses 23 ans de règne. Avec notre esprit contemporain, on ne peut que le féliciter de tout cela, et dire que cela ne fait que conforter la thèse de l'apogée.

Sur le plan intérieur, il appliqua également une politique d'apaisement.
Il autorisa à nouveau le culte juif, interdit pas Hadrien, bien qu'en accompagnant cette autorisation de mesures pour limiter le prosélytisme judaïque.
Il interdit également la persécution et l'arrestation arbitraire des chrétiens. Il n'autorisa leur condamnation qu'au cas où ils soient également convaincus de complot contre l'Empire.
Il s'appliqua à améliorer le sort des esclaves, ainsi que celui des femmes qui eurent désormais presque les mêmes droits et devoirs que les hommes. Il abolit la torture.
Il avait également versé, dès sa nomination, toute sa fortune personnelle au trésor impérial.
Sa probité fut telle que le Sénat lui donna le titre "d'Antonin le Pieux", qui n'a pas grand chose à voir avec sa piété religieuse qui était pourtant réelle (il était notamment attaché au culte de Mithra).

Pourtant, la thèse de "l'apogée" est quelque peu contestée par certains historiens qui pensent qu'en ces temps Antiques, tout Empire qui ne continuait pas à s'étendre était condamné à un déclin financier et politique, et que l'attitude pacifique et attentiste d'Antonin a été le terreau de la déchéance de l'Empire Romain.
Et de fait, la suite du règne d'Antonin semble leur donner raison. Car à peine Marc-Aurèle lui succède-t-il que les frontières de l'Empire se retrouvent dangereusement attaquées en plusieurs endroits, notamment par les Parthes et les Germains.

Marc-Aurèle, connu pour avoir interdit (provisoirement) certains jeux de cirque qu'il trouvait barbares, était à la fois Empereur et philosophe. Mais il recommença de plus belle à persécuter les chrétiens. Et à sa mort, il reprit les vieilles coutumes dynastiques et nomma son fils naturel Commode, pourtant très jeune (16 ans), aux rênes de l'Empire.[2]
En mettant sur le trône quelques incapables, cette coutume dynastique devait ensuite faciliter la fissuration de l'Empire.


Statue équestre de Marc-Aurèle (Rome)


________________________________
1. Pour en savoir plus sur Carthage, voir aussi le Rat ici, et le Lion

2. Ces derniers événements sont revus et corrigés dans le film "Gladiator" de Ridley Scott. Ce dernier fait de Marc-Aurèle un personnage plus sage qu'il ne l'était réellement, puisqu'il lui prête l'intention de déshériter son incapable de fils de la Couronne d'Empereur, et de refaire de Rome une République. Mais l'ignoooooble Commode ne l'entend pas de cette oreille et tue son père de ses mains !

draleuq, 12h47 :: :: :: [8 soupirs de satisfaction]

23 Avril 2011 ::

« Bonjour et bienvenue à la boucherie Sanzot »

:: Professorat

Lorsque l'on se cogne la tête contre un pot et que cela sonne creux, ce n'est pas forcément le pot qui est vide.

Confucius


Parmi toutes les tâches qui m’échoient dans cette formidable « fonction » de directeur d’école (je rappelle à toutes fins utiles qu’il s’agit d’une fonction multitâches sans statut, et non d’un métier), une de mes « préférées » est décidément de faire standardiste téléphonique.
Outre le dialogue ubuesque avec quelques funk-tionnaires du conseil général, narré récemment , d’autres personnages hauts en couleur de ma blogosphère nous ont déjà régalés par d’autres conversations trépidantes. Finipe par exemple, toujours avec des funk-tionnaires, mais surtout Winy et sa très regrettée rubrique « bonjour et bienvenue chez XxX », rubrique à laquelle je dédie ce billet, ainsi qu'à Hergé qui a bercé mon enfance.

Après ça, je pense que certaines personnes de mes amis, parmi lesquels Winy en particulier, justement, comprendront probablement pourquoi, dans un cadre privé, je voue une telle haine aux conversations téléphoniques.



Ce matin donc, j’ai eu cette courte communication :

- DrrRRRrrrriiing
- Ecole Machin, draleuq, j’écoute ?
- Allô ? Les établissements Gerbeau ?

Ce n’est bien entendu pas la première fois que j’ai affaire à un turlupin qui me téléphone sans écouter une seule traître syllabe de ce que je lui dis. Nous avons vu récemment que jusqu’à trois fonctionnaires successives, durant le même appel et dans le sens de l’ascendance hiérarchique, pouvaient ne rien écouter de ce que je leur disais !
Mais le fait que cet abruti se soit trompé de numéro m’a brusquement rappelé une anecdote, que dis-je, un véritable feuilleton, qui date maintenant de quelques années…

- DrrrRRRRrrrring
- Allô ? (à cette époque, je ne prenais pas encore très au sérieux ma tâche de standardiste, et je ne me présentais point en décrochant, ce qui est très mal dans un service public, j’en conviens)
- [voix d’une femme d’un certain âge] Allô, Monsieur Daniel ?
- Non madame, vous avez dû faire erreur, vous êtes à l’école Machin.
[Clic] (l’interlocutrice a raccroché fort impoliment)

Quelques semaines plus tard :

- DrrrRRRRRrrring
- Ecole Machin, draleuq, j’écoute ? (comme vous le voyez, j’étais devenu, entre temps, un honorable standardiste du service public)
- Allô, Monsieur Daniel ?
- Non Madame, comme je l’ai mentionné, vous êtes à l’école Machin et il n’y a pas de Monsieur Daniel ici.
- Ah bon ? Désolée. (comme vous le voyez, cette dame, de son côté, était devenue polie. C’est fou ce qu’on peut faire de progrès en trois semaines)
- Pas de mal. Au revoir Madame.

Quelques jours plus tard :

- DrrrrRRRrrrrRRing
- Ecole Machin, draleuq, j’écoute ?
- [long silence, manifestant sans aucun doute une hésitation] M… Monsieur Daniel ?
- Non madame, vous êtes dans une école ! Vous avez fait un faux numéro et je vous engage à faire plus attention car j’ai l’impression que ça vous arrive souvent ! Au revoir madame !

Quelques minutes plus tard :

- DrrRRRRrrrring
- Ecole Machin, draleuq j’écoute ?
- [quelques secondes le temps que la reconnaissance vocale monte jusqu’à l’éponge qui lui sert d’encéphale] Rooooh bah mince j’a encore fait un mauvais numéro !
- Certes. Au revoir madame.

Je n’entendis alors plus parler d’elle et de son Monsieur Daniel pendant plusieurs mois, et je me crus tiré d’affaire. Mal, très mal m’en avait pris, car un beau jour…

- DrRRRRrrrriiiing
- Ecole Machin, draleuq j’écoute ?
- Allôôôô ? Monsieur Daniel ?
- [quelques secondes de deuil] Madame, vous avez fait un faux numéro. Vous savez ce que nous allons faire ? Je vais vous donner mon numéro de téléphone et vous allez le comparer avec celui que vous avez tapé, comme ça nous saurons pourquoi vous vous trompez tout le temps.
- Non non, c’est pas la peine [clic]

Quelques heures plus tard :

- DrRRRRrrrrrring
- Ecole Machin, draleuq j’écoute ?
- [silence, suivi de quelques marmonnements imbitables qui me suffisent à la reconnaître]
- Ah ! Madame Daniel ! Vous tombez bien ! Justement j’allais vous appeler pour prendre des nouvelles de Monsieur Daniel ! Comment ça va-t-y ? Ça se passe-t-y bien la convalescence ?
- Mais… Mais… J’m’appelle pas Madame Daniel ! [à en juger par la voix effarée, le mystère s’épaissit pour mon interlocutrice]
- Oh ben zut alors, j’m’avions sans doute trompé de numéro ! [clic]

Quelques jours plus tard :

- DrrrRRrrRrrrRing
- Ecole Machin, draleuq j’écoute ?
- All… Allô M…Mons… Monsieur D…
- NON MADAME VOUS N’ETES PAS A LA BOUCHERIE SANZOT !
- [voix qui s’amenuise à mesure qu’elle s’éloigne du combiné]Bah dis donc, ils sont vraiment pas bien là dedans… [clic]

Ainsi, peut-être grâce à la force de persuasion du Capitaine Haddock, se termina l’incroyable feuilleton Monsieur Daniel. Dommage, juste au moment où ça commençait vraiment à devenir drôle…

Quand j’y songe, je me dis que la vie est injuste : il y a sans doute là, quelque part dans la nature, un de nos frères humains nommé Monsieur Daniel, qui ignore que l’amour de sa vie le cherche désespérément et ne parvient pas à le retrouver, sans doute pour une cause dérisoire, telle qu’une dyslexie très prononcée lui faisant lire des 6 à la place des 9. Quelle misère !



Copyrat draleuq 2007

draleuq, 18h04 :: :: :: [3 provocations]

20 Avril 2011 ::

« Grève du cerveau chez les fonctionnaires »

:: Professorat

Cette très récente petite aventure téléphonique prouve à l’évidence que la grève, chez les fonctionnaires, s’accompagne également d’une grève de cerveau.
Quant à la greffe de cerveau, elle… Elle n’est pas prévue pour tout de suite !


Sur mon répondeur :
« Bonjour, Mme Branque du Conseil Général service Transports. Pourriez-vous me rappeler s’il vous plaît au XX XX XX XX XX »

Je tape le numéro :
- Tuuuut Tuuuut Tuuuut (12 fois, jusqu’ici tout est normal)
- Vous êtes bien au Conseil Général, nous allons prendre votre appel…
- Allô, Standard du Conseil Général, j’écoute.
- Bonjour, draleuq, directeur de l’école Machin. Je voudrais le service transports, Mme Branque m’a laissé un message en me disant de la rappeler.
- Elle a dû s’absenter. Vous voulez rappeler ou laisser un message à sa secrétaire ?
- Je rappellerai. Je n’ai pas de message à laisser vu que je ne sais pas ce qu’elle voulait.
- D’accord. Je vous passe quand même sa secrétaire.
- Tuuuuut.Allô, Service transports j’écoute.
- Bonjour, draleuq, directeur de l’école Machin. Mme Branque m’a laissé un message en me disant de la rappeler.
- Vous êtes de l’école ?
- Machin !
- Bien, je vous la passe.
- ?
- Allô, Mme Branque, j’écoute.
- Oui, ici draleuq, directeur de l’école Machin.
- (…)
- Allô ?!?
- Eh bien, oui ? Je vous écoute ?
- Euh… C’est plutôt à moi de vous écouter. Vous avez laissé un message sur mon répondeur pour que je vous rappelle !
- Ah ?... Euh… Oui. Euh… Rappelez-moi, vous êtes l’école… ?
- Machin !!!!
- Ah, euh, oui, ça devait être pour avoir l’état de présence de euh… octobre, je crois.
- Celui-là même que vous m’avez réclamé il y a dix jours et que je vous ai faxé dans la minute qui a suivi votre appel ?...
- Ah… ? Euh… Bon, écoutez, je vérifie, et je vous rappelle en cas de besoin.

Copyrat draleuq 2007

draleuq, 14h05 :: :: :: [0 remarque spirituelle]

13 Avril 2011 ::

« Allô, c'est toi qui baises ma femme ? »

:: Baratin

Puis t’es parti avec elle
Vieille canaille
En emportant la vaisselle
Le dessus d’lit en dentelle
L’argenterie et les rideaux
Eh, vieux chameau

Mais j’ai sorti mon pétard
Vieille canaille
Et quand j’ te tiendrai au bout
Ah ah, je rigolerai un bon coup
Et j’ t’aurai vite refroidi
Vieux bandit

Serge Gainsbourg


Hier soir, coup de téléphone inopiné d’un numéro de portable inconnu :

- Allô ?
-
- Allô ?
-
- Allô allô ? Allôôôô ? Aaaaaaaaallô ?
- Allô…
- Oui, allô ?
- Alors, c’est toi qui baises ma femme ?
- Plaît-il ?
- C’est toi qui baises ma femme, enculé ?
- Mmh non, je n’ai pas cet honneur. Et pas ce second honneur non plus.
- Comment tu t’appelles ?
- Moi c’est draleuq, et vous-même ?
- Moi c’est Jean-Yves Cocu.
- Enchanté, Jean-Yves. Et qu’est-ce qui vous fait dire que je baise votre femme ?
- Oui oui, c’est bien toi alors, enculé. Ma femme est partie avec un draleuq il y a quelques jours, qui habite à Boumdent-les-Vainlouses.
- Je m’appelle draleuq, j’habite bien Boumdent-les-Vainlouses, et pour autant que je sache, je suis le seul draleuq à y habiter, mais il n’en demeure pas moins que je ne baise pas ta femme (tu permettras sans doute que je te tutoie, étant donné que tu me fais l’honneur et la joie de me servir de « l’enculé » à chacune de tes phrases, je crois que je peux m’autoriser cette familiarité)
- T’es bien le draleuq qui habite 12, rue du Lampadaire éteint à Boumdent-les-Vainlouses ?
- Ah mille regrets, ça c’est mon ancienne adresse, j’ai déménagé il y a bientôt quatre ans. Tu peux vérifier.
- Oh mais je sais, j’ai déjà vérifié, j’en viens là, et effectivement y’a aucun nom sur la porte et personne ne répond quand on frappe.
- Eh bien, tu sembles donc très décidé. Heureusement donc que j’ai déménagé, car si au lieu de me téléphoner, tu avais sonné à ma porte pour me traiter d’enculé et m’accuser de baiser ta femme, tu m’en aurais vu fort contrit.
- Ouais mais pavoise pas trop vite, y’a mon fils qu’est parti taleur là, il est très en colère, il te cherche pour te casser la gueule !
- Mmh oui, de mieux en mieux. Et effectivement, il pourrait bien me trouver vu que je suis dans l’annuaire. Tu devrais donc l’appeler et le retenir, parce que j’ai eu une très mauvaise journée, et foutu pour foutu elle est partie pour être pourrie jusqu’au bout, et même s’il n’est pas dans mes habitudes de ravaler le portrait d’un homo sapiens juvénile cherchant à extérioriser sa souffrance pour de légitimes raisons, mieux vaut prévenir que guérir, et là ce n’est pas un vain mot.
- Ouais mais c’est forcément toi puisque tu l’as dit toi-même, t’es le seul draleuq à Boumdent-les-Vainlouses, et elle est partie avec un draleuq qu’habite à Boumdent-les-Vainlouses !
- Mmmh, reprenons : comment s’appelle ta femme ?
- Isabelle. Isabelle Cocu.
- Je ne connais absolument pas d’Isabelle Cocu. Comment as-tu trouvé mon numéro ?
- Ben, je l’ai eue au téléphone pendant une heure et demie, là. D’abord sur son portable, puis après sur ce numéro de fixe.
- De ce numéro de fixe-là ? Sur lequel tu m'as appelé et sur lequel nous parlons en ce moment-même ? Il y a moins d’1 h 30 ?
- Oui !
- Donc pendant que j’étais encore au boulot, et alors que ma compagne et son fils étaient tous deux dans la maison, ta femme se serait introduite subrepticement chez moi pour te téléphoner de ma ligne fixe et te dire que je couchais avec elle ? C’est bien ce que t’es en train de me dire ?
- Euh…

(… encore plusieurs longues minutes de palabres…)

- Bon j’ai vraiment dû faire erreur, alors… Désolé pour le dérangement, hein !
- Nan nan t’inquiète, c’est pas comme si tu m’avais accusé à tort de baiser ta femme que je n’ai jamais vue alors que la mienne était juste à côté !
- Ah, ta femme était à côté ? Ah bah tu pourras également lui adresser mes excuses, alors. Moi aussi j’ai une compagne, maintenant, donc je comprends !
- QUOI ? ÇA FAIT UNE DEMI-HEURE QUE TU ME LES BRISES PARCE QUE SOI DISANT JE BAISE TA FEMME QUE JE NE CONNAIS MEME PAS, ET LA T’ES EN TRAIN DE ME DIRE QUE T’AS DEJA UNE COPINE ALORS QUE TA FEMME N’EST PARTIE QUE DEPUIS QUELQUES JOURS !? DONNE-MOI TON ADRESSE, EN FAIT C’EST MOI QUI VAIS VENIR TE FUMER, ENCULE !

draleuq, 11h57 :: :: :: [9 pleurnicheries]

3 Avril 2011 ::

« Vicissitudes de la communication envers les usagers du service public »

:: Professorat

Pauvre France !
(mon père)


C’est bien triste, mais c’est un constat : plus ça va, moins les parents d’élèves surveillent leurs mômes et s’occupent d’eux, et plus ils se foutent royalement de tout ce qu’on peut leur dire/écrire.
Evidemment, en tant que service public, nous sommes tenus d’être courtois avec eux en toutes circonstances (malheureusement, la réciproque est loin d’être toujours vraie). Nos remarques à leur encontre sont donc d’autant moins prises au sérieux qu’elles sont polies et bien enrobées. En d’autres termes, les parents sont comme leurs chérubins : si tu essaies de les raisonner gentiment, ils te répondent par un sourire qui veut dire clairement « cause toujours, tu m’intéresses ! »

Je m’attacherai aujourd’hui à imaginer (fantasmer serait d’ailleurs le terme le plus exact) ce que pourrait donner comme résultat de changer son fusil d’épaule en remplaçant le langage PC (Politiquement Correct) par le Langage MAC (Méchamment Agressif et Convaincant)

PC : pendant que vous attendez la sortie de l’un de vos enfants, l’autre joue à cache-cache dans les locaux de l’école, crie à côté de mon bureau, vient même jusque dans mon bureau pour s’y cacher (c’est une bonne cachette, il faut le reconnaître). Il lui arrive de faire des concours avec ses petits copains à celui qui sautera de la plus haute marche. A en juger par ses tonitruantes et triomphantes vociférations, j’ai pu établir que son record était situé à 7 marches… C’est beaucoup pour un enfant de 4 ans, non ?
MAC : en réponse à certains comportements répréhensibles et défauts de surveillance parentale, J’ai décidé de rétablir la loi médiévale. Dorénavant, veuillez prendre note que :
- Tout enfant hurlant à côté de mon bureau se verra couper la langue
- Tout enfant jouant à cache-cache ou sautant des marches se verra estropier d’une jambe. Si d’aventure l’enfant se cassait une jambe en sautant des marches, on lui casserait l’autre pour rétablir la symétrie.
- Tout enfant coupable de vol ou de voie de fait se verra trancher une main.


PC : adresse et numéro de téléphone, madame, s’il vous plaît ?... Excusez-moi un instant… Non mon petit, tu ne dois pas toucher aux papiers sur mon bureau, j’en ai besoin pour mon travail, c’est très important. Non, tu ne dois pas jouer avec ce ballon non plus, je l’ai confisqué à un élève tout à l’heure dans la cour, et on ne joue pas au ballon dans un bureau. Sois sage pendant que ta maman t’inscrit à l’école, il n’y en a pas pour longtemps…
MAC : Madame, votre fils est officiellement inscrit depuis 2 minutes sur les registres de l’école, aussi il est soumis à la Loi Médiévale que j’ai récemment rétablie. Je le condamne donc à avoir la main tranchée céans, dans la salle des maîtres où se trouve le massicot. Si vous êtes un peu sensible, ce n’est pas la peine de l’accompagner.

PC : Par mesure de confort et d’économie d’énergie, merci de refermer la porte derrière vous, les locaux de l’école sont chauffés.
MAC : Le prochain qui ne ferme pas la porte derrière lui, je le passe à travers la fenêtre, comme ça au moins on saura pourquoi il y a des courants d’air.

PC : Mesdames et Messieurs, merci de ne pas entrer dans les locaux scolaires avec vos chiens, comme il est stipulé dans le règlement intérieur de l’école.
MAC : Dehors les clébards galeux, c’est pas la SPA ici ! On a déjà vos rejetons à surveiller, c’est amplement suffisant comme ménagerie. Tout sac à puces contrevenant sera abattu sans sommation.

PC : Chers parents, merci de bien vouloir attendre votre enfant à l’extérieur de l’école afin d’éviter toute bousculade dans les locaux scolaires.
MAC : Pour mettre un terme définitif à la déplorable coutume consistant à entrer dans l’école comme dans un moulin, la cour a été minée. Aussi, toute personne de plus de 50 kg s’y aventurant sera, au mieux, réduite à l’état de cul-de-jatte, au pire à l’état de charpie.

PC : Nous vous rappelons que vous êtes responsables de vos enfants dès lors qu’ils sont sortis de l’école. Merci de votre compréhension.
MAC : Si vous ne voulez pas vous occuper de vos gosses, c’est moi qui vais m’en occuper, dans un autre sens du terme.

PC : Merci d’arriver à l’heure pour chercher vos enfants.
MAC : A compter d’aujourd’hui, dix coups de règle par minute de retard seront administrés à tout enfant dont les parents ne seront pas à l’heure pour venir le chercher. Au bout du cinquième retard dans la même année scolaire, l’otage sera sommairement exécuté.

PC : Les informations communiquées sur le cahier de liaison de votre enfant sont très importantes et peuvent être urgentes. Merci de le vérifier tous les soirs.
MAC : Tout mot sur le cahier de liaison qui ne sera pas signé au bout de trois jours sera tatoué sur le front de votre enfant à l’encre indélébile. Comme ça vous ne pourrez pas dire que vous ne l’avez pas lu…Quoi que…

PC : Nous vous demandons d’avoir l’extrême gentillesse et la grande bonté de bien vouloir quitter les locaux de l’école dès la sonnerie d’entrée en classe. Signé : votre directeur qui vous aime et vous respecte infiniment.
MAC : Bon, dehors les morues là. Ça a sonné y’a deux minutes, et si vous n’avez pas entendu, je vous conseille d’aller consulter. C’est une école ici, c’est pas un salon de thé !

PC : Monsieur,
Je ne peux malheureusement pas donner une suite favorable à votre demande de partir avec votre fille de 10 ans pour trois semaines de vacances à la Réunion hors-vacances scolaires. Je suis bien conscient, en effet, que les billets d’avion sont beaucoup plus chers pendant les vacances scolaires et que vos moyens sont limités, mais donner mon accord constituerait un précédent qui me semble assez dangereux. Si vous passez outre mon autorisation, l’enseignant ne saurait bien entendu vous fournir les cours pour trois semaines comme vous l’avez demandé.

MAC : Monsieur,
Je souhaiterais vivement savoir si votre demande est sérieuse ou si vous vous foutez de ma gueule. Car si ce n’est pas le cas, ça y ressemble bigrement. Je fais comment quand je dois prendre l’avion moi ? Vous croyez que je suis Crésus ? Non seulement il est hors de question que j’autorise cette déscolarisation, mais en plus, si vous passez outre mon autorisation, votre fille sera purement et simplement virée de l’école comme je n’en ai pas le droit, mais c’est pas grave je prendrai le gauche. Vous n’aurez qu’à l’inscrire à l’école privée, ils sont bien meilleurs que nous pour faire garderie
[1] .

Copyrat draleuq 2007


_________________________________
1. Ceci n'est pas, malgré les apparences, une attaque sournoise et gratuite contre l'école libre, mais s'appuie au contraire sur un argument fréquemment avancé par les parents qui mettent leur enfant à l'école privée : "eux au moins, ils ne font jamais la grève". Curieusement, ces parents sont d'ailleurs souvent les mêmes qui s'octroient des petites vacances sur le temps scolaire.

draleuq, 01h05 :: :: :: [2 sarcasmes grinçants]